13 novembre 1974. — Premier discours de Yasser Arafat devant l’Assemblée générale des Nations unies et réponse du représentant permanent d’Israël

La « question de Palestine » est inscrite à l’ordre du jour de la 29e session de l’Assemblée générale sur la demande de 56 États membres dans une lettre au secrétaire général datée du 11 septembre 1974. Dans sa résolution 3210 (XXIX) du 14 octobre, l’Assemblée générale invite l’Organisation de libération de la Palestine à participer à ses délibérations et Yasser Arafat prononce un discours historique à sa tribune le 13 novembre 1974 : « Aujourd’hui, je suis venu porteur d’un rameau d’olivier et d’un fusil de combattant de la liberté. Ne laissez pas le rameau d’olivier tomber de ma main. » Pour Yosef Tekoah, représentant permanent d’Israël, l’Assemblée générale a « capitulé devant une organisation d’assassins ». « Aujourd’hui, ajoute-t-il, cette tribune a été souillée par le chef de ces assassins… ». En novembre 1947, le nombre des États membres était de 57 et la résolution 181 (II) sur le partage de la Palestine est adoptée par 33 voix contre 13 et 10 abstentions. En octobre 1974, le nombre des États membres est de 138 et la résolution 3210 (XXIX) est adoptée par 105 voix contre 4 et 20 abstentions.

Résolution 3210 (XXIX) de l’Assemblée générale

Vote de la résolution 3210 (XXIX)

Discours de Yasser Arafat, président du Comité exécutif de l’OLP

Discours de Yosef Tekoah, représentant permanent d’Israël auprès des Nations unies

Résolution 3236 (XXIX) de l’Assemblée générale


Chronologie indicative

29 novembre 1947. — Résolution 181 (II). « Gouvernement futur de la Palestine » de l’Assemblée générale ; elle comprend un « plan de partage avec union économique ».

14 mai 1948. — Proclamation de l’État d’Israël.

15 mai 1948. — Déclaration de la Ligue arabe sur la situation en Palestine.

29 mai 1948. — Résolution 50 (1948) du Conseil de sécurité : elle met à la disposition du médiateur des Nations unies (14 mai 1948) et de la Commission de la trêve (23 avril 1948) un « nombre suffisant d’observateurs militaires » ; c’est l’origine de l’ONUST — Organisme des Nations unies chargé de la surveillance de la trêve —, première mission d’observation des Nations unies.

31 octobre 1956. — Résolution 119 (1956) du Conseil de sécurité : en raison du « manque d’unanimité des membres permanents », le Conseil convoque l’Assemblée générale en session extraordinaire d’urgence comme le prévoit la résolution 377 A (V) du 3 novembre 1950.

4 novembre 1956. — Résolution 998 (ES-I) de l’Assemblée générale : création de la FUNU — Force d’urgence des Nations unies —, première mission de maintien de la paix des Nations unies.

22 novembre 1967. — Résolution 242 (1967) du Conseil de sécurité.

10 décembre 1969. — Résolution 2535 (XXIV). « Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient » : l’Assemblée générale reconnaît que « le problème des réfugiés arabes de Palestine provient du fait que leurs droits inaliénables, tels qu’ils sont énoncés dans la Charte des Nations unies et dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, leur sont déniés » et « réaffirme les droits inaliénables du peuple de Palestine ».

22 octobre 1973. — Résolution 338 (1973) du Conseil de sécurité.

11 septembre 1974. — Dans une lettre au secrétaire général, 56 États membres demande l’inscription de la « question de Palestine » à l’ordre du jour de la 29e session (1974-1975) de l’Assemblée générale.

17 septembre 1974. — Ouverture de la 29e session de l’Assemblée générale ; élection comme président du ministre algérien des Affaires étrangères Abdelaziz Bouteflika.

21 septembre 1974. — L’Assemblée générale inscrit la question de Palestine à l’ordre du jour de 29e session.

14 octobre 1974. — Résolution 3210 (XXIX). « Invitation à l’Organisation de libération de la Palestine » de l’Assemblée générale.

13 novembre 1974. — Discours de Yasser Arafat devant l’Assemblée générale (10 h 30) ; réponse de Yosef Tekoah, représentant permanent d’Israël auprès des Nations unies (15 h 30).

22 novembre 1974. — Résolution 3210 (XXIX). « Question de Palestine » de l’Assemblée générale.


Résolution 3210 (XXIX) de l’Assemblée générale

3210 (XXIX). Invitation à l’Organisation de libération de la Palestine

L’Assemblée générale,

Considérant que le peuple palestinien est la principale partie intéressée à la question de Palestine,

Invite l’Organisation de libération de la Palestine, représentant du peuple palestinien, à participer aux délibérations de l’Assemblée générale sur la question de Palestine en séances plénières.

2268e séance pléniere

14 octobre 1974

A/RES/3210(XXIX)


Vote de la résolution 3210 (XXIX)

75. Le PRÉSIDENT : Nous allons maintenant prendre une décision sur le projet de résolution A/L.736 et Add.1 et 2. Un vote par appel nominal a été demandé.

Il est procédé au vote par appel nominal.

L’appel commence par le Soudan dont le nom est tiré au sort par le Président.

Votent pour : Soudan, Suède, République arabe syrienne, Thaïlande, Togo, Trinité-et-Tobago, Tunisie, Turquie, Ouganda, République socialiste soviétique d’Ukraine, Union des Républiques socialistes soviétiques, Émirats arabes unis, République-Unie du Cameroun, République-Unie de Tanzanie, Haute-Volta, Venezuela, Yémen, Yougoslavie, Zaïre, Zambie, Afghanistan, Albanie, Algérie, Argentine, Autriche, Bahreïn, Bangladesh, Bhoutan, Botswana, Brésil, Bulgarie, Burundi, République socialiste soviétique de Biélorussie, République centrafricaine, Tchad, Chine, Congo, Cuba, Chypre, Tchécoslovaquie, Dahomey, Yémen démocratique, Égypte, El Salvador, Guinée équatoriale, Éthiopie, Fidji, Finlande, France, Gabon, Gambie, République démocratique allemande, Ghana, Grèce, Guinée, Guinée-Bissau, Guyane, Hongrie, Inde, Indonésie, Iran, Irak, Irlande, Italie, Côte d’Ivoire, Jamaïque, Japon, Jordanie, Kenya, République khmère, Koweït, Liban, Libéria, République arabe libyenne, Madagascar, Malaisie, Mali, Malte, Mauritanie, Maurice, Mexique, Mongolie, Maroc, Népal, Nouvelle-Zélande, Niger, Nigéria, Norvège, Oman, Pakistan, Panama, Pérou, Philippines, Pologne, Portugal, Qatar, Roumanie, Rwanda, Arabie saoudite, Sénégal, Sierra Leone, Singapour, Somalie, Espagne, Sri Lanka.

Votent contre : États-Unis d’Amérique, Bolivie, République dominicaine, Israël.

S’abstiennent : Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, Uruguay, Australie, Barbade, Belgique, Birmanie, Canada, Colombie, Costa Rica, Danemark, Équateur, Allemagne (République fédérale d’), Guatemala, Haïti, Islande, Laos, Luxembourg, Pays-Bas, Nicaragua, Paraguay.

Par 105 voix contre 4, avec 20 abstentions, le projet de résolution est adopté [résolution 3210 (XXIX)].

A/PV.2268


Discours de Yasser Arafat, président du Comité exécutif de l’OLP

1. Le PRÉSIDENT : L’Assemblée générale se rappellera que, par sa résolution 3210 (XXIX), adoptée le 14 octobre 1974, elle a décidé d’inviter l’Organisation de libération de la Palestine [OLP], représentant du peuple palestinien, à participer aux délibérations de l’Assemblée générale sur la question de Palestine en séances plénières.

[Le Président poursuit en arabe]

2. Le PRÉSIDENT (interprétation de l’arabe) : Au nom de l’Assemblée générale, je souhaite une chaleureuse bienvenue à M. Yasser Arafat, président du Comité exécutif de l’Organisation de libération de la Palestine et commandant en chef de la révolution palestinienne. Je l’invite maintenant à s’adresser à l’Assemblée générale.

3. M. ARAFAT (interprétation de l’arabe) : Monsieur le Président, je suis heureux de saisir cette occasion pour vous présenter, au nom du peuple de Palestine et du mouvement qui est à la tête de sa lutte nationale, l’Organisation de libération de la Palestine, mes félicitations sincères pour votre élection à la présidence de la vingt-neuvième session de l’Assemblée générale des Nations unies. Nous vous avons connu comme un défenseur sincère et dévoué de la cause de la liberté, de la justice et de la paix. Nous vous avons connu à l’avant-garde des combattants de la liberté pendant l’héroïque guerre de libération nationale menée par l’Algérie. Aujourd’hui, l’Algérie occupe au sein de la communauté internationale une place de choix et elle a su assumer ses responsabilités, tant nationales qu’internationales, d’une manière qui lui a acquis l’appui et l’estime des nations du monde entier.

4. J’aimerais également saisir cette occasion pour adresser mes sincères remerciements à Kurt Waldheim, secrétaire général de l’Organisation des Nations unies, pour les efforts considérables qu’il a déployés et qu’il continue de déployer pour nous permettre d’assumer au mieux nos responsabilités.

5. Je suis heureux aussi de féliciter, au nom du peuple palestinien, trois pays qui ont acquis l’indépendance nationale et sont devenus membres des Nations unies: la Guinée-Bissau, le Bangladesh et la Grenade. Nous souhaitons plein succès aux dirigeants de ces États membres et prospérité à leurs peuples.

6. Je vous remercie, Monsieur le Président, d’avoir invité l’OLP à participer à cette session plénière de l’Assemblée générale des Nations unies. Je suis reconnaissant à tous les États membres qui ont contribué à faire inscrire la question de Palestine à l’ordre du jour de l’Assemblée en tant que point séparé. Cette décision a rendu possible la résolution nous invitant à prendre la parole devant elle à propos de la question de Palestine.

7. C’est là une occasion extrêmement importante. L’Organisation des Nations unies reprend l’examen de la question de Palestine et nous estimons que cette décision est une victoire pour l’ONU et une victoire pour la cause de notre peuple. Elle prouve, une fois de plus, que les Nations unies d’aujourd’hui sont différentes de ce qu’elles étaient hier, tout comme le monde d’aujourd’hui n’est plus le monde d’hier. Aujourd’hui, les Nations unies, comptent 138 membres, ce qui reflète mieux la volonté de la communauté internationale. C’est pour cela que l’Organisation est mieux à même maintenant de mettre en œuvre les principes de sa Charte [et] de la Déclaration universelle des droits de l’homme, et mieux à même d’appuyer les nobles causes de la paix et de la justice.

8. Notre peuple a déjà commencé à percevoir ce changement, tout comme les peuples de l’Asie, de l’Afrique et de l’Amérique latine, ce qui a rehaussé le prestige de l’Organisation aux yeux de notre peuple et des autres peuples. Nous sommes confirmés dans l’espoir que l’ONU pourra contribuer activement à faire triompher les causes de la paix, de la justice, de la liberté et de l’indépendance. Plus que jamais, nous sommes résolus à édifier un monde à l’abri du colonialisme, de l’impérialisme, du néo-colonialisme et du racisme sous toutes ses formes, y compris le sionisme.

9. Nous vivons dans un monde qui aspire à la paix, à la justice, à l’égalité et à la liberté. Ce monde souhaite que les nations opprimées, qui ploient actuellement sous le joug de l’impérialisme, puissent recouvrer la liberté et exercer leur droit à l’autodétermination. Ce monde souhaite que les relations entre nations soient fondées sur l’égalité, la coexistence pacifique, le respect mutuel, la non-ingérence dans les affaires intérieures d’autrui et le respect de la souveraineté nationale, de l’indépendance et de l’unité territoriale sur la base de la justice et des avantages mutuels. Ce monde est décidé à ce que les liens économiques qui l’unissent soient fondés sur la justice, l’égalité et la reconnaissance des intérêts mutuels. Il aspire enfin à mettre ses ressourcés humaines au service de la lutte contre ces fléaux que sont la misère, la famine, la maladie et les catastrophes naturelles et du progrès scientifique et technique pour le plus grand bien de l’humanité. Ainsi pourrons-nous espérer réduire l’écart entre pays en développement et pays développés. Mais comment réaliser de telles aspirations dans un monde dominé par les tensions, l’injustice, l’oppression, la discrimination raciale et l’exploitation, un monde sur lequel pèse la menace de catastrophes économiques, de guerres, de crises sans fin ?

10. Beaucoup de peuples, dont ceux du Zimbabwe, de la Namibie, de l’Afrique du Sud, de la Palestine, sont encore victimes de l’oppression et de la violence. Ces régions du monde sont le théâtre de luttes armées imposées par l’impérialisme et la discrimination raciale, qui ne sont que des manifestations d’agression et de terreur. Ce sont là des cas dans lesquels des peuples opprimés ont été forcés par des circonstances intolérables à lutter contre cette oppression, et leur lutte est juste et légitime.

11. Il est essentiel que la communauté internationale soutienne la lutte de ces peuples et les aide à assurer le triomphe de leur juste cause et à exercer leur droit à. l’autodétermination.

12. Les peuples de l’Indochine sont toujours exposés à l’agression. Des complots sont ourdis pour les empêcher de connaître la paix et d’atteindre leurs objectifs. Si les peuples du monde entier ont accueilli favorablement les accords de paix du Laos et du Viet Nam du Sud, nul ne peut dire que la paix ait véritablement pu être instaurée ni que les forces responsables de l’agression aient maintenant cessé leurs attaques contre le Viet Nam. Il en va de même de l’agression militaire actuelle contre le Cambodge. Il incombe donc à la communauté internationale de soutenir ces peuples opprimés et de condamner les desseins que ces oppresseurs forment contre la paix. De plus, en dépit de l’attitude positive adoptée par la République démocratique populaire de Corée, en vue d’une solution équitable et pacifique de la question de Corée, cette dernière n’est pas encore réglée.

13. Il y a quelques mois, nous avons été témoins de l’explosion du problème de Chypre. Les peuples du monde entier partagent les souffrances des Chypriotes. Nous demandons que les Nations unies poursuivent leurs efforts afin d’aboutir à une solution juste de cette question, pour que les malheurs provoqués par la guerre soient épargnés au peuple chypriote et pour lui assurer la paix et l’indépendance. Il ne fait toutefois aucun doute que le problème de Chypre s’inscrit dans le cadre des problèmes du Moyen-Orient aussi bien que de la Méditerranée.

14. Dans les efforts qu’ils déploient pour remplacer un ordre économique mondial démodé mais toujours dominant par un nouvel ordre plus rationnel et plus logique, les pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine doivent faire face à des attaques implacables visant à déjouer ces efforts. Ces pays ont exposé leurs points de vue à ce sujet au cours de la sixième session extraordinaire de l’Assemblée générale sur les matières premières et le développement. En effet, il faut mettre immédiatement un terme au pillage et à l’exploitation à outrance des ressources des peuples pauvres. Il ne faut pas empêcher ceux-ci de chercher à mettre en valeur leurs ressources et à exercer sur elles un droit de regard. De plus, il est absolument nécessaire qu’ils puissent vendre leurs matières premières à des prix équitables.

15. D’autre part, ces pays continuent d’être gênés dans la réalisation de leurs objectifs essentiels, formulés lors des réunions de la troisième Conférence des Nations unies sur le droit de la mer, à Caracas, de la Conférence mondiale de la population à Bucarest et de la Conférence mondiale de l’alimentation à Rome, et il faudrait que l’ONU s’emploie par tous les moyens à provoquer des changements radicaux dans le système économique mondial actuel, car ces changements permettront aux pays en voie de développement de progresser. Il faudrait que l’Organisation prenne en mains la lutte contre l’inflation, lutte dont la responsabilité est surtout assumée actuellement par les pays en voie de développement, notamment les pays producteurs de pétrole. Il faudrait dénoncer les menaces qui pèsent sur ces pays du fait de leurs justes revendications.

16. La course aux armements ne donne aucun signe de ralentissement et, de ce fait, le monde est menacé de perdre ses richesses et de voir ses énergies totalement gaspillées. Les risques de violence armée en sont partout accrus. Nous comptons que l’ONU s’emploiera résolument à empêcher les achats d’armes illimités – à prévenir l’éventualité même d’une destruction nucléaire, à réduire les sommes énormes affectées à la technologie militaire ; à assurer que les sommes consacrées à la guerre soient utilisées à des projets de développement ; à accroître la production et à instaurer le bien-être pour l’humanité tout entière.

17. Et cependant, la tension est à son point culminant dans notre région, car l’entité sioniste y est fermement résolue à garder les territoires arabes qu’elle a occupés. Le sionisme persiste dans les agressions qu’il mène contre nous et nos territoires. De nouveaux préparatifs militaires sont en cours. Ils sont le prélude d’une cinquième guerre d’agression contre nous. Ces signes doivent être observés avec le plus grande attention, car il y a de graves chances que cette guerre soit le présage d’une destruction nucléaire et de l’anéantissement de l’humanité tout entière.

18. Le monde a besoin que d’immenses efforts soient faits si l’on veut que se réalisent ses aspirations à la paix, à la liberté, à la justice, à l’égalité et au développement et que sa lutte contre l’impérialisme, le colonialisme, le néo-colonialisme et le racisme sous toutes ses formes, y compris le sionisme soit couronnée de succès, car ce n’est qu’au prix de tels efforts que seront réalisées les aspirations de tous les peuples même de ceux dont les gouvernements s’opposent à ce qu’on prenne cette voie, la voie menant à la réalisation des principes consacrés par la Charte des Nations unies et la Déclaration universelle des droits de l’homme. Si le statu quo devait être maintenu, le monde serait exposé à des conflits armés prolongés et à des catastrophes économiques, humaines et naturelles.

19. En dépit de cette situation de crise qui règne dans le monde et malgré les forces des ténèbres qui s’appesantissent sur nous, malgré le sous-développement et les maux dont souffre l’humanité, nous assistons néanmoins à un changement extraordinaire. L’ancien monde de l’impérialisme, du colonialisme, du néo-colonialisme et du racisme sous toutes ses formes, y compris, au premier chef, le sionisme, s’effondre devant nous. L’évolution de l’histoire fait qu’un monde nouveau se substitue à l’ancien, un monde nouveau qui verra le triomphe des justes causes. De cette victoire nous sommes convaincus.

20. C’est dans cette perspective de l’avènement d’un monde nouveau et de lutte que s’inscrit la question de Palestine. La Palestine est au premier plan des tristes causes pour lesquelles les masses en butte à l’impérialisme et à l’agression luttent de toutes leurs forces. S’il m’a été donné l’occasion de prendre la parole devant l’Assemblée, il n’est pas possible, j’en suis conscient, à l’heure où je m’adresse à elle, que cette occasion ne soit pas accordée aussi à tous les mouvements de libération qui combattent le racisme et l’impérialisme. C’est Pour cela qu’en leur nom, au nom de tous les êtres humains qui luttent pour la liberté et l’autodétermination, j’invite l’Assemblée générale à accorder à leur juste cause, comme elle l’a fait pour la nôtre, toute l’attention nécessaire. Son appui permettra d’asseoir la protection de la paix dans le monde sur des bases solides et partant, de consacrer la naissance d’un monde nouveau où les peuples vivront à l’abri de l’oppression, de la peur et de la terreur et libres de jouir de leurs droits. Je l’ai dit, c’est dans cette perspective que doit se situer la question de Palestine.

21. En prenant la parole du haut de cette tribune, je ne fais qu’exprimer notre foi en la lutte politique et diplomatique qui ne fait que compléter et renforcer notre lutte armée. C’est là également une expression de notre appréciation pour le rôle que l’ONU est capable de jouer dans le règlement des problèmes mondiaux. Mais elle ne le pourra que lorsqu’elle se sera adaptée à la réalité vivante des aspirations des peuples envers lesquels une organisation de dimensions aussi véritablement internationales a des obligations uniques.

22. En s’adressant à l’Assemblée générale, aujourd’hui, notre peuple proclame sa foi dans l’avenir, il n’est pas enchaîné par les tragédies du passé ou par les limitations du présent. Si en parlant du présent, nous évoquons le passé, c’est seulement pour éclairer la voie dans laquelle nous allons nous engager à côté des autres mouvements de libération nationale. Si nous parlons des racines historiques de notre problème, c’est parce qu’il y a, parmi ceux qui sont présents ici, des gens qui, alors même qu’ils occupent nos maisons, font paître leurs troupeaux sur nos pâturages, cueillent les fruits de nos arbres, cultivent nos champs, prétendent que nous sommes des êtres désincarnés, sans aucune substance, sans traditions et sans avenir. Si nous parlons de nos racines, c’est aussi parce que certains, tout récemment encore, considéraient et considèrent toujours que notre problème est uniquement un problème de réfugiés et ont présenté le problème du Moyen-Orient comme un simple différend de frontières, ou guère plus, entre les États arabes et l’entité sioniste. Ils pensent que notre peuple revendique des droits qui ne lui appartiennent pas et lutte sans aucune raison logique ou valable, uniquement pour troubler la paix et à des fins terroristes. Il en est parmi vous – et j’entends par là les Etats-Unis d’Amérique et d’autres pays comme eux qui fournissent à notre ennemi des avions, des bombes et tous les engins de mort et de destruction. Il en est qui adoptent à notre égard une position hostile et déforment délibérément les faits – et cela au détriment du peuple américain et de l’amitié avec ce grand peuple à laquelle nous aspirons, car l’histoire de sa lutte pour libérer son pays est pour nous un sujet d’estime et d’appréciation.

23. J’aimerais saisir cette occasion pour lancer, du haut de cette tribune, un appel au peuple américain et lui demander d’appuyer notre peuple héroïque qui lutte. Je voudrais qu’il appuie la justice et le droit, qu’il se souvienne de son héros, George Washington, qui a lutté pour l’indépendance et la liberté de son pays ; je voudrais que ce peuple se souvienne d’Abraham Lincoln, qui s’est fait le champion des pauvres et des déshérités, et aussi de Woodrow Wilson, dont notre peuple a adopté, respecte et vénère les quatorze points. Je m’adresse directement au peuple américain et je lui demande : ces manifestations d’hostilité organisées à l’extérieur de ce bâtiment expriment-elles vraiment les intentions profondes du peuple américain ? Quel crime le peuple de Palestine a-t-il commis à l’encontre du peuple américain ? Pourquoi donc ces manifestations hostiles ? Est-ce que cela sert les intérêts des États-Unis ? Est-ce que cela sert le peuple américain ? Jamais ! Et j’espère sincèrement que les Américains se souviendront que leur amitié avec la nation arabe tout entière est beaucoup trop importante, beaucoup trop durable, et même beaucoup trop utile pour que ces manifestations d’hostilité puissent lui nuire.

24. Si nous exposons les racines historiques de notre problème, c’est parce que nous sommes convaincus qu’il faut s’attaquer aux racines mêmes des problèmes qui préoccupent le monde si l’on veut leur donner une solution valable. Nous proposons donc une méthode radicale, qui est l’antithèse d’une approche des problèmes internationaux tendant à obscurcir les origines historiques en les ignorant, en les niant et en obéissant servilement au présent.

25. Les racines de la question de Palestine remontent à la fin du XIXe siècle, en d’autres termes à l’ère du colonialisme et de la colonisation telle que nous la connaissons aujourd’hui ; c’est à ce moment-là que le sionisme en tant que système est né ; son but était de conquérir la Palestine grâce à des immigrants européens tout comme la plus grande partie de l’Afrique avait été colonisée, bien plus, pillée, par les colons. C’est l’époque où le colonialisme venant de l’Occident se répandait en Afrique, en Asie et en Amérique latine pour y établir des colonies et y exercer les formes les plus cruelles d’exploitation, d’oppression et de pillage au détriment des peuples de ces trois continents. Cette époque n’est pas révolue. Nous trouvons un exemple évident de la manière totalement répréhensible dont elle se perpétue dans le racisme pratiqué en Afrique du Sud et en Palestine.

26. À l’instar du colonialisme et de ses démagogues, qui ont essayé d’ennoblir leur conquêtes, leurs pillages et leurs attaques perpétuelles à l’encontre des peuples africains, en prétendant qu’ils accomplissaient une mission « de civilisation et de modernisation », les immigrants sionistes ont dissimulé leurs objectifs lorsqu’ils ont conquis la Palestine. Le colonialisme en tant que système et les colonialistes en tant qu’instruments ont utilisé la religion, la couleur, la race et la langue pour justifier l’exploitation des Africains et leur assujettissement cruel par la terreur et la discrimination. Les mêmes méthodes ont été employées en Palestine pour usurper notre terre et chasser notre peuple de son foyer national.

27. À l’instar du colonialisme qui a utilisé les pauvres, les déshérités et les exploités pour mener ses agressions et installer des colonies, l’impérialisme mondial et les dirigeants sionistes se sont servis des Juifs européens qui étaient opprimés et déshérités. Les Juifs européens ont été transformés en instruments d’agression ; ils sont devenus les pions d’un colonialisme fortement empreint de discrimination raciale.

28. La théologie sioniste a été employée contre notre peuple palestinien. Il ne s’agissait pas seulement de colonialisme de peuplement à la mode occidentale, mais également de couper les Juifs de leurs différents pays et de leur ôter tout sentiment d’appartenant à ceux-ci. Le sionisme est une idéologie impérialiste, colonialiste et raciste ; il est profondément réactionnaire et discriminatoire ; il peut être comparé à l’antisémitisme dans ses principes les plus rétrogrades et, partant, il en constitue l’autre volet. Lorsque l’on propose que les Juifs, quel que soit le pays où ils résident ne lui portent pas allégeance et ne vivent pas sur un pied d’égalité avec les citoyens non Juifs, cela va dans le sens de l’antisémitisme. Lorsque l’on dit que la seule solution au problème juif serait que les Juifs abandonnent des communautés ou des nations auxquelles ils ont appartenu pendant des centaines d’années et lorsque l’on dit que les Juifs devraient régler le problème juif en émigrant par la force sur le territoire d’un autre peuple, on adopte, ce faisant, la même position qu’adoptent les antisémites à l’égard des Juifs.

29. C’est pour cela que nous voyons un lien étroit entre Cecil Rhodes, qui a encouragé le colonialisme en Afrique du Sud-Est, et Theodor Herzl, qui a établi des plans pour le colonialisme de peuplement en Palestine. Ayant reçu un certificat de bonne conduite colonialiste de la part de Rhodes, Herzl s’en est allé présenter ce certificat au Gouvernement britannique, en espérant que celui-ci appuierait sa politique sioniste. En échange, les sionistes ont promis aux Britanniques une base impérialiste sur le sol de Palestine afin que les intérêts impérialistes puissent être sauvegardés à l’un de leurs principaux points stratégiques.

30. Ainsi donc, le mouvement sioniste s’est allié directement avec le colonialisme mondial afin de s’emparer de notre territoire. Permettez-moi à présent de citer quelques faits historiques à propos de cette alliance.

31. L’invasion de la Palestine par les Juifs a commencé en 1881. Avant le déferlement des premiers immigrants, la Palestine avait une population de 500 000 âmes ; la plupart des habitants étaient musulmans ou chrétiens et il n’y avait que 20 000 Juifs. Chaque groupe de population jouissait de la liberté de religion, ce qui caractérise notre civilisation.

32. La Palestine était une terre verdoyante, habitée principalement par la population arabe, qui y édifiait sa vie et enrichissait son patrimoine culturel.

33. Entre 1882 et 1917, le mouvement sioniste a attiré dans notre territoire environ 50 000 Juifs européens. Pour ce faire, ce mouvement a dû recourir à la supercherie. Le fait qu’il ait réussi à obtenir du Gouvernement britannique la déclaration Balfour prouve, une fois de plus, l’alliance entre le sionisme et l’impérialisme. En outre, en promettant au mouvement sioniste quelque chose qu’il n’était pas en leur pouvoir de lui donner, les Britanniques ont démontré combien l’impérialisme pouvait être oppressif. Les Britanniques n’avaient pas le droit d’autoriser le mouvement sioniste à installer un foyer national. La Société des Nations, quant à elle, a abandonné le peuple arabe, et les principes et les promesses du président Wilson sont devenus inopérants. Et l’impérialisme britannique, sous forme de mandat, nous a été imposé cruellement et directement. Ce mandat proclamé par la Société des Nations permettait aux conquérants sionistes de consolider leur position sur notre territoire.

34. Dans les trente années qui ont suivi la déclaration Balfour le mouvement sioniste, de concert avec son allié colonial, a fait en sorte que des Juifs européens continuent d’immigrer et viennent usurper les terres des Arabes de Palestine. C’est ainsi qu’en 1947 la population juive de Palestine comptait environ 600 000 habitants, qui détenaient près de 6 p. 100 des terres arabes du pays, tandis que la population arabe de Palestine se chiffrait à 1 250 000 habitants environ.

35. Le résultat de cette collusion entre la Puissance mandataire et le mouvement sioniste, grâce aussi à l’appui de quelques pays, a été que l’Assemblée générale, aux débuts de l’Organisation, a approuvé une recommandation visant à partager notre patrie palestinienne. Cela a eu lieu dans une atmosphère envenimée par des agissements contestables et des pressions importantes. L’Assemblée générale a divisé ce qu’elle n’avait pas le droit de diviser : une partie indivisible. Lorsque nous avons rejeté cette décision, notre attitude a été celle de la mère naturelle qui avait refusé au roi Salomon de couper son fils en deux alors que l’autre femme qui le réclamait aussi était disposée à accepter cette solution. En outre, malgré la résolution établissant le partage qui accordait aux colonialistes 54 p. 100 de la terre de Palestine, ceux-ci ont été mécontents de cette décision et ont commencé une guerre terroriste contre la population civile arabe. Ils ont occupé 81 p. 100 de l’ensemble de la terre de Palestine, déracinant ainsi un million d’Arabes. C’est ainsi qu’ils ont occupé 524 villes et villages arabes, en en détruisant 385 au cours de cette invasion. Cela fait, ils ont installé leurs propres colonies sur les ruines de nos terres et de nos fermes. Ils ont cultivé nos vergers et nos champs. C’est ici que le problème de Palestine a son origine. Il ne s’agit donc pas d’un conflit entre deux religions ou deux nationalismes. Il ne s’agit pas d’un différend de frontières entre deux pays voisins. Il s’agit plutôt de la cause d’un peuple qui a été chassé de sa terre, dispersé, déraciné et condamné à vivre, dans sa grande majorité, en exil et dans des camps de réfugiés.

36. Avec l’appui des puissances impérialistes et colonialistes, l’entité sioniste a réussi à devenir membre de l’Organisation des Nations unies. Les dirigeants sionistes ont obtenu également que la question de Palestine soit supprimée de l’ordre du jour de l’Assemblée générale et ils ont réussi à tromper l’opinion mondiale en lui faisant croire qu’il ne s’agissait que d’un simple problème de réfugiés ayant besoin de la charité de bienfaiteurs ou qu’il suffisait d’installer sur une autre terre que la leur.

37. Non contente de tout cela, l’entité raciste, s’inspirant du principe impérialiste-colonialiste, s’est transformée en bastion de l’impérialisme et en arsenal d’armes. Cela lui a permis d’assumer son rôle qui consiste à asservir la population arabe et à l’attaquer afin de satisfaire ses ambitions expansionnistes en annexant des terres palestiniennes et d’autres terres arabes. Outre les nombreux actes d’agression commis par cette entité contre les États arabes, deux guerres de grande envergure ont été déclenchées en 1956 et en 1967, mettant ainsi en danger la paix mondiale et la sécurité internationale.

38. Par suite de l’agression sioniste de juin 1967, l’ennemi a occupé le Sinaï égyptien jusqu’au canal de Suez ; il a également occupé les hauteurs syriennes du Golan, en plus de toute la rive occidentale palestinienne du Jourdain. Ces faits ont abouti à créer dans notre région, le « problème du Moyen-Orient », comme on l’appelle communément. La situation s’est encore aggravée du fait que l’ennemi a persisté dans sa politique d’occupation illégale des terres arabes, et l’a même renforcée, établissant ainsi une tête de pont de l’impérialisme mondial dirigé contre la nation arabe. Le sionisme n’a respecté aucune des décisions du Conseil de sécurité et des appels lancés à l’opinion publique mondiale, l’invitant à se retirer des territoires occupés en juin 1967. Tous les efforts pacifiques déployés à l’échelle internationale n’ont pas dissuadé l’ennemi de poursuivre sa politique d’expansion. Les nations arabes, notamment l’Égypte et la Syrie, n’avaient alors plus d’autre solution que de déployer tous leurs efforts pour se préparer à résister fermement à cette invasion armée barbare afin de libérer les terres arabes et de rétablir les droits du peuple palestinien. C’est ce qu’ils ont fait après que tous les moyens pacifiques se furent révélés inefficaces.

39. C’est dans ces circonstances que la quatrième guerre, celle d’octobre 1973, a éclaté, prouvant ainsi à l’ennemi sioniste la faillite de sa politique d’occupation et d’expansion et de la loi de la force militaire. Malgré tout cela, les dirigeants de l’entité sioniste sont loin d’avoir tiré la leçon de cette expérience. Ils se préparent à déclencher une cinquième guerre, recourant une fois encore au langage de la supériorité militaire, de l’agression, du terrorisme, de l’asservissement et, en un mot, du langage de la guerre avec les Arabes.

40. Notre peuple est profondément peiné de constater que l’on répand le mythe selon lequel les colons étrangers auraient mis en valeur, à la sueur de leur front, nos terres qui étaient désertiques et pas même habitées, et de s’entendre dire que nul n’aurait eu à souffrir de cette colonisation. Non, de tels mensonges doivent être dénoncés du haut de cette tribune. Il faut que le monde sache que la Palestine a été le berceau des cultures et des civilisations les plus anciennes. Son peuple arabe n’a cessé depuis des milliers d’années de semer, de construire et de diffuser sa culture à travers tout le territoire ; donnant l’exemple de la tolérance religieuse, et se faisant le gardien fidèle de tous les Lieux saints qui se trouvent sur son sol. En tant que fils de Jérusalem, je garde pour moi et pour mon peuple les souvenirs les plus beaux et les images les plus vives de la fraternité religieuse qui régnait dans notre Ville sainte avant la catastrophe. Notre peuple n’a cessé de pratiquer cette politique jusqu’au moment où il a été dispersé après la création de l’État d’Israël. Néanmoins, nous sommes déterminés à poursuivre notre rôle humanitaire en Palestine et nous n’accepterons jamais que cette terre devienne un tremplin pour l’agression ou un camp raciste ayant pour dessein la destruction de la civilisation, de la culture, du progrès et de la paix. Notre peuple ne peut que suivre le sillage de ses ancêtres en résistant aux envahisseurs, en assumant la tâche privilégiée de défendre sa terre natale, sa nation arabe, sa culture et sa civilisation, et en sauvegardant le berceau de la religion monothéiste.

41. À ce propos, je voudrais évoquer brièvement certaines des prises de position israéliennes: son appui à l’organisation de l’armée secrète en Algérie, ainsi qu’aux colons installés en Afrique, que ce soit au Congo, en Angola, au Mozambique, au Zimbabwe, en Azanie ou en Afrique du Sud, et son soutien au Viet Nam du Sud contre la révolution vietnamienne. Ajoutons à cela l’appui donné en tous lieux par Israël aux impérialistes et aux racistes et son obstructionnisme au Comité des Vingt-Quatre, son refus de voter en faveur de l’indépendance des pays africains et son opposition aux revendications de nombre de pays d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, et de plusieurs autres États dans les conférences sur les matières premières, la population, le droit de la mer et l’alimentation. Tous ces faits montrent bien le véritable visage de l’ennemi qui a usurpé notre terre. Ils justifient la lutte honorable que nous menons contre lui. Alors que nous défendons l’avenir, il défend les mythes du passé.

42. L’ennemi auquel nous faisons face s’est rendu coupable de nombreux agissements contre les Juifs eux-mêmes, car il existe au sein de l’entité sioniste, un racisme inné contre les Juifs orientaux. Alors que nous condamnions avec force les massacres des Juifs par les nazis, les dirigeants sionistes semblaient alors se préoccuper davantage d’exploiter ces massacres autant qu’ils le pouvaient afin de réaliser leur objectif d’immigration en Palestine.

43. Si cette immigration des Juifs en Palestine avait eu pour but de leur permettre de vivre à nos côtés, en jouissant des mêmes droits et en ayant les mêmes devoirs, nous leur aurions ouvert les portes, dans la mesure où notre sol pouvait les accueillir. Tel a été le cas pour les milliers d’Arméniens et de Circassiens qui vivent parmi nous en tant que frères et citoyens bénéficiant des mêmes droits. Mais que le but de cette émigration soit d’usurper notre terre, de nous disperser et de faire de nous des citoyens de deuxième catégorie, c’est là une chose que nul ne peut raisonnablement exiger de nous. C’est pour cela que, dès le début, notre révolution n’a pas été motivée par des facteurs raciaux ou religieux. Elle n’a jamais été dirigée contre l’homme juif en tant que tel, mais contre le sionisme raciste et l’agression flagrante. Dans ce sens, notre révolution est également faite pour l’homme juif en tant qu’être humain. Nous luttons pour que les juifs, les chrétiens et les musulmans puissent vivre sur le même pied, c’est-à-dire en bénéficiant des mêmes droits et en assumant les mêmes devoirs, sans discrimination raciale ou religieuse.

44. Donc, nous établissons une distinction entre le judaïsme et le sionisme. Nous nous opposons au sionisme colonialiste, mais nous respectons la foi juive. Aujourd’hui, près d’un siècle après la naissance du mouvement sioniste, nous lançons une mise en garde contre le danger croissant que ce mouvement constitue pour les Juifs du monde entier, pour le peuple arabe, pour la paix et la sécurité mondiales. Car le sionisme encourage les Juifs à quitter leurs pays et à adopter une nationalité artificielle. Les sionistes poursuivent leurs activités terroristes bien que la terreur se soit révélée inefficace. L’émigration constante des Juifs d’Israël, qui va d’ailleurs s’accentuer lorsque les bastions du colonialisme et du racisme seront abattus dans le monde, est un exemple de l’échec inévitable de ces activités.

45. Nous invitons les peuples et les gouvernements du monde à lutter fermement contre les tentatives sionistes visant à encourager les Juifs à émigrer en Israël et à usurper notre terre. Nous les invitons également à s’opposer tout aussi fermement à toute discrimination contre un être humain pour des raisons de religion, de race ou de couleur.

46. Pourquoi le peuple arabe de Palestine, pourquoi notre peuple devrait-il payer le prix de la discrimination qui existe dans le monde ? Pourquoi doit-il être tenu responsable du problème de l’immigration juive si ce problème existe encore dans certains esprits ? Pourquoi ceux qui se font les champions de cette cause n’ouvrent-ils pas largement leur pays à ces immigrants juifs ? Pourquoi ne les aident-ils pas ?

47. Ceux qui nous qualifient de terroristes le font pour mystifier l’opinion mondiale et l’empêcher de voir la réalité, de voir notre vrai visage, visage qui est celui de la justice. Ils s’efforcent de dissimuler leur vrai visage qui est celui de la terreur et de la tyrannie et de nier la situation de légitime défense dans laquelle nous nous trouvons placés.

48. La différence entre le révolutionnaire et le terroriste réside dans la raison de la lutte. Celui qui lutte pour une cause juste, celui qui lutte pour la liberté et pour obtenir la libération de son pays des envahisseurs et des colonialistes ne peut guère être qualifié de terroriste, ou alors il faudrait considérer le peuple américain comme terroriste lorsqu’il a lutté contre le colonialisme britannique ; il faudrait considérer la résistance opposée aux nazis par les Européens comme terroriste ; il faudrait également qualifier de la même façon la lutte des peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine. Il faudrait que beaucoup d’entre vous, réunis dans cette salle, se considèrent comme terroristes. Notre lutte est en réalité une lutte juste et légitime, une lutte consacrée par la Charte des Nations unies, ainsi que par la Déclaration universelle des droits de l’homme. Quant à ceux qui prennent les armes pour lutter contre des causes justes, ceux qui déclenchent la guerre pour occuper la terre d’autres peuples, les coloniser et les opprimer, ce sont ceux-là les vrais terroristes, et leurs actes doivent être condamnés et considérés comme des crimes de guerre. C’est la justice d’une cause qui détermine le droit à la lutte.

49. Le terrorisme sioniste qui s’est exercé contre le peuple palestinien pour le chasser de son territoire et usurper ses terres a été enregistré dans vos documents officiels. En effet, des milliers de Palestiniens ont été assassinés dans les villages et dans les villes. Des dizaines de milliers de personnes ont été contraintes, par la force des armes, à quitter leurs terres et le foyer de leurs ancêtres. Que d’hommes, de femmes, d’enfants et de vieillards ont été évacués et obligés d’aller dans le désert et d’escalader des montagnes, sans eau ni nourriture ! Aucun de ceux qui ont vu en 1948 la catastrophe s’abattre sur les habitants de centaines de villes et de villages, à Jérusalem, Jaffa, Lydda, Ramle et Galilée, ne pourra jamais oublier cette expérience, même si un silence de plomb a réussi à masquer ces crimes horribles, comme il a dissimulé les vestiges de 385 villes et villages palestiniens détruits à l’époque et effacés de la carte du pays. On a détruit 19 000 maisons au cours des sept dernières années, ce qui équivaut à la destruction totale de 200 autres villages palestiniens. Quant aux innombrables personnes qui ont été mutilées par suite des sévices qu’on leur a fait subir dans les prisons israéliennes, cela, nul silence ne parviendra à le dissimuler.

50. Le terrorisme sioniste se nourrit de haine. Cette haine a même été dirigée contre l’olivier, qui est le fier symbole de notre pays, et qui ne rappelait que trop que cette terre est palestinienne. C’est pourquoi ils ont cherché à le détruire. Comment peut-on décrire la déclaration faite par Golda Meir lorsqu’elle a exprimé son inquiétude au sujet « des naissances d’enfants palestiniens qui se produisent quotidiennement » ? On voit dans l’arbre palestinien, dans l’enfant palestinien, un ennemi dont il faut se débarrasser. Pendant des dizaines d’années, les sionistes n’ont cessé de harceler les dirigeants culturels, politiques, sociaux et artistiques de notre pays en pratiquant la terreur et en les assassinant. Ils ont volé notre patrimoine culturel, notre folklore populaire sous prétexte que cela leur appartient. Leur terrorisme s’est même étendu jusqu’aux lieux sacrés de Jérusalem, ville de la paix que nous chérissons tant. Ils ont voulu changer le caractère de cette ville pour qu’elle perde sa qualité arabe, musulmane et chrétienne en évinçant sa population arabe pour l’annexer.

51. Il faut aussi parler de l’incendie de la mosquée Al Aqsa et de la défiguration de nombreux monuments historiques et religieux. Jérusalem, avec son histoire religieuse et ses valeurs spirituelles, est le témoin pour les générations à venir de notre présence éternelle, de notre civilisation, de notre valeur humaine, et il n’est pas étonnant que sous son ciel, les trois religions soient nées et que ces religions brillent pour éclairer les hommes, pour traduire les tribulations comme les espoirs de l’humanité, et pour tracer la voie de l’avenir dans le sens de ces espoirs.

52. Le petit nombre d’Arabes palestiniens qui n’ont pas été expulsés par les sionistes en 1948 sont à l’heure qu’il est des réfugiés sur leur propre terre. La législation israélienne les traite comme des citoyens de deuxième catégorie, et même de troisième catégorie — étant donné que les Juifs orientaux sont des citoyens de deuxième catégorie — et ils ont été soumis à toutes les formes de discrimination raciale et de terrorisme après avoir vu leurs terres et leurs biens confisqués. Ils ont été victimes de massacres sanguinaires comme celui de Kfar Kassim ; ils ont été forcés d’évacuer leurs villages et ils se sont vu refuser le droit de retourner chez eux, comme ce fut le cas des habitants de Ikrit et Kfar-Birim. Depuis 26 ans, notre population vit sous la loi martiale et elle n’a pas le droit de se déplacer d’un lieu à un autre sans obtenir au préalable l’autorisation du gouverneur militaire israélien, et ce, alors même qu’Israël promulguait une loi par laquelle il accordait automatiquement la citoyenneté israélienne à tout Juif désirant immigrer dans notre patrie. De plus, une autre loi israélienne stipule que les Palestiniens qui n’étaient pas présents dans leurs villes ou villages au moment de l’occupation n’ont pas droit à la citoyenneté israélienne.

53. Le dossier des dirigeants israéliens est rempli d’actes de terreur perpétrés contre ceux de notre peuple qui sont restés au Sinaï ou sur les hauteurs du Golan pendant l’occupation. Le bombardement criminel de l’école de Bahr-al-Nakar et celui de l’usine d’Abou Zaabal sont des actes de terrorisme que nous ne pourrons jamais oublier. La destruction totale de la ville syrienne de Kouneïtra est encore un exemple éloquent de terrorisme systématique. Si l’on devait dresser un registre des actes terroristes perpétrés par les sionistes dans le sud du Liban, comme la piraterie, les bombardements, la politique de terre brûlée, la destruction de centaines de maisons, l’expulsion de civils et l’enlèvement de citoyens libanais, l’énormité de ces actes bouleverserait même les plus insensibles. Il s’agit là de violations flagrantes de la souveraineté du Liban et ce, dans le but de préparer le détournement des eaux de la rivière Litani.

54. Il est inutile de rappeler les nombreuses résolutions adoptées par l’Assemblée générale pour condamner les agressions commises par Israël contre les États arabes, les violations israéliennes des droits de l’homme et des articles des Conventions de Genève de même que les résolutions relatives à l’annexion de la ville de Jérusalem et au rétablissement de son ancien statut.

55. De tels actes ne peuvent être qualifiés que d’actes de barbarie et de terrorisme. Et pourtant, les racistes sionistes et colonialistes ont l’audace de qualifier sa lutte légitime de notre peuple de terrorisme ! Comment peut-on déformer davantage la vérité ! À ceux qui ont usurpé notre terre, à ceux qui commettent des actes meurtriers de terrorisme contre notre peuple et qui pratiquent la discrimination raciale à une échelle plus grande encore que les racistes sud-africains, nous demandons de prendre en considération la résolution par laquelle l’Assemblée générale suspend pour une période d’un an les pouvoirs de l’Afrique du Sud au sein de l’Organisation. C’est là l’issue fatale de toute politique raciste qui adopte la loi de la jungle, qui usurpe la terre de son prochain et qui persiste à poursuivre une politique d’oppression.

56. Pendant les trente dernières années, notre peuple a lutté contre l’occupation britannique et l’invasion sioniste, qui toutes deux avaient pour objectif l’usurpation de notre terre. Six révoltes importantes et des dizaines de soulèvements populaires se sont produits pour faire échouer cette tentative et pour que cette terre reste nôtre. Plus de 30 000 martyrs ont trouvé la mort dans cette lutte, ce qui équivaut, en termes comparatifs, à 6 millions d’Américains.

57. Lorsque la majorité du peuple palestinien a été arrachée à sa terre, en 1948, la lutte pour l’autodétermination s’est poursuivie dans les conditions les plus difficiles. Nous avons tout tenté, mais sans succès, pour continuer le combat politique en vue de faire reconnaître nos droits nationaux. Pendant ce temps, nous devions lutter pour subsister. Même dans l’exil nous avons assuré l’éducation de nos enfants, tout ceci afin d’assurer notre survie.

58. Le peuple palestinien a produit des milliers de médecins, d’avocats, de professeurs et de savants qui ont participé activement au développement des pays arabes voisins de leur patrie usurpée. Ceux-ci ont utilisé leurs revenus pour aider les jeunes et les vieillards qui demeuraient dans les camps de réfugiés. Ils ont éduqué leurs jeunes frères et sœurs, aidé leurs parents et se sont occupés de leurs enfants. Pendant tout ce temps, le Palestinien n’a cessé de penser au retour. L’attachement du Palestinien à sa patrie et sa volonté d’y revenir n’ont jamais été ébranlés ; son enthousiasme n’a jamais été atteint ; rien n’a pu le faire renoncer à son identité palestinienne ou à sa terre. Le temps ne lui a pas fait oublier sa patrie comme certains l’espéraient. Quand notre peuple a perdu espoir dans la communauté internationale qui persistait à ignorer ses droits, et quand il s’est rendu compte qu’il ne pourrait récupérer un seul pouce de sa patrie par des moyens exclusivement politiques, il n’a pas eu d’autre choix que de recourir à la lutte armée. Il a investi dans cette lutte toutes ses ressources matérielles et humaines. Nous avons fait face avec courage aux actes les plus odieux du terrorisme israélien qui voulaient décourager et arrêter cette lutte.

59. Pendant les dix dernières années de notre combat, des milliers de Palestiniens sont devenus des martyrs, ont été blessés, mutilés ou emprisonnés ; ils se sont sacrifiés pour résister à la menace imminente de disparition, pour recouvrer notre droit à l’autodétermination et notre droit incontestable à rentrer dans notre patrie. Dans la plus grande dignité et dans le meilleur esprit révolutionnaire, le peuple palestinien a su garder courage dans les prisons et les camps de concentration israéliens, ou face à toutes sortes de vexations et d’intimidations. Il lutte pour son existence même et pour préserver le caractère arabe de sa patrie. Il résiste à l’oppression, à la tyrannie et au terrorisme sous toutes leurs formes les plus hideuses.

60. C’est grâce à notre lutte populaire armée que notre politique et nos institutions nationales se sont cristallisées-et qu’un mouvement de libération nationale, rassemblant tous les groupes palestiniens, toutes les organisations et toutes les capacités du peuple, s’est concrétisé dans l’OLP.

61. Dans le cadre de ce mouvement palestinien de libération nationale, la lutte de notre peuple a mûri et s’est assez développée pour faire place à la lutte politique et sociale, à côté de la lutte armée. L’OLP est devenue un facteur extrêmement important en créant un nouvel homme palestinien, capable de forger l’avenir de sa patrie. Elle ne se contente plus de mobiliser les Palestiniens pour répondre au défi du présent.

62. L’OLP peut s’enorgueillir d’avoir entrepris de nombreuses activités culturelles et éducatives au moment même où elle lutte par les armes et doit affronter les coups féroces du terrorisme sioniste. Nous avons créé des instituts de recherche scientifique, de développement agricole, de protection sociale, ainsi que des centres pour la renaissance de notre patrimoine culturel et la conservation de notre folklore. Beaucoup de poètes, d’artistes et d’écrivains palestiniens ont enrichi la culture arabe et la culture mondiale. Leurs œuvres profondément humaines ont gagné l’admiration de tous ceux qui les connaissent. Par contraste, notre ennemi a systématiquement détruit notre culture et a diffusé des idéologies impérialistes et racistes ; bref, tout ce qui s’oppose au progrès, à la justice, à la démocratie et à la paix.

63. L’OLP a acquis sa légitimité grâce à ses sacrifices, à son rôle d’avant-garde, et à l’énergie qu’elle a mise à conduire le combat. Sa légitimité, elle la tient aussi des masses palestiniennes qui, se reconnaissant en elle, l’ont choisie pour diriger leur combat. L’OLP a acquis sa légitimité en veillant à ce que toutes les factions, syndicats ou groupements ainsi que tous les talents soient représentés, soit au Conseil national, soit dans les institutions palestiniennes. Sa légitimité a été encore renforcée par l’appui de la nation arabe tout entière et a été consacrée à la dernière conférence arabe au sommet, qui a réaffirmé le droit de l’OLP en tant que seul représentant du peuple palestinien, à établir un État national indépendant sur tout le territoire libéré de Palestine.

64. La légitimité de l’OLP a été accrue par l’appui fraternel des autres mouvements de libération et des nations amies qui nous comprennent et qui se sont portées à nos côtés pour nous encourager et nous aider dans la lutte que nous menons pour nos droits nationaux.

65. Je dois exprimer ici la gratitude chaleureuse de nos combattants révolutionnaires et de notre peuple aux pays non alignés, aux pays socialistes, aux pays islamiques, aux pays africains, aux pays amis d’Europe ainsi qu’à tous nos autres amis d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine.

66. L’OLP est le seul représentant légitime du peuple palestinien ; c’est pour cela qu’elle exprime les aspirations et les désirs de ce peuple. C’est également pour cela qu’elle porte devant vous ces aspirations et ces désirs en vous invitant à ne pas vous dérober à la lourde responsabilité historique qui vous incombe à l’égard de notre juste cause.

67. Depuis de nombreuses années notre peuple subit les ravages de la guerre, de la destruction et de la dispersion. Nous avons payé du sang de nos fils, ce qui est une perte irréparable. Nous avons subi l’occupation, la dispersion, les évictions et la terreur plus longtemps qu’aucun autre peuple. Et tout cela n’a pas rendu notre peuple rancunier ou revanchard. Tout cela ne nous a pas rendus racistes. Tout cela ne nous a pas fait oublier comment faire le départ entre nos amis et nos ennemis.

68. C’est pour cela que nous déplorons tous les crimes perpétrés contre les Juifs ; nous déplorons aussi la réelle discrimination dont les Juifs ont souffert en raison de leur croyance. 69. Je suis un rebelle, la liberté est ma cause. Je sais qu’il y a parmi vous des hommes qui se sont trouvés dans la même situation de dissidence qui est la mienne et à partir de laquelle je dois mener mon combat. Vous avez dû vous battre pour faire de votre idéal une réalité. Vous devez donc aujourd’hui partager mon idéal. Je pense que c’est cela qui m’autorise à faire appel à votre aide pour qu’ensemble nous transformions nos aspirations en une brillante réalité, notre aspiration commune à un avenir paisible sur la terre sacrée de Palestine.

70. Devant un tribunal militaire israélien, un révolutionnaire juif a dit : « Je ne suis pas un terroriste ; je crois qu’un État démocratique doit exister sur cette terre palestinienne. » Il s’agit de Ahud Adif, qui a été incarcéré par les militaristes sionistes. Il a été mis en prison avec ceux qui partagent son idéal ; du haut de cette tribune, je les salue et je salue leur lutte héroïque.

71. Les mêmes tribunaux militaires sont également en train de juger un valeureux homme d’Église, l’archevêque Capucci. Faisant de la main le signe de la victoire, symbole de notre révolution, il a déclaré : « Ce que j’ai fait, je l’ai fait pour que tous vivent en paix sur cette terre de paix. » Cet archevêque, évidemment, sera condamné au même sort sinistre qu’Adif. Je lui adresse un salut chaleureux.

72. Pourquoi ne pourrais-je pas rêver ? Pourquoi ne pourrais-je pas espérer ? La révolution ne consiste-t- elle pas à traduire dans les faits les rêves et les espoirs ? Alors, agissons ensemble pour que mon rêve devienne réalité, pour que je puisse revenir d’exil avec mon peuple pour vivre là-bas en Palestine avec ce combattant de la liberté juif et ses camarades, avec ce prêtre et ces frères, dans un unique État démocratique où chrétiens, juifs et musulmans vivraient dans la justice, l’égalité et la fraternité.

73. Est-ce que ce noble rêve ne vaut pas que je lutte avec tous ceux qui sont épris de liberté dans le monde ? Ce rêve est d’autant plus admirable qu’il a pour objet la Palestine, cette terre sainte, cette terre de la paix, du martyre, de l’héroïsme et de l’histoire.

74. On sait que les Juifs d’Europe et des États-Unis ont conduit la lutte pour la laïcité et la séparation de l’Église et de l’État. On sait qu’ils ont lutté contre la discrimination, fondée sur la croyance religieuse. Comment donc peuvent-ils rejeter cet idéal humaniste lorsqu’il s’agit de la Terre sainte ? Comment peuvent-ils continuer de soutenir dans sa politique la nation la plus fanatique, la plus discriminatoire et la plus fermée qui soit ?

75. En ma qualité officielle de président de l’OLP et de chef de la révolution palestinienne, je proclame que, lorsque nous parlons de nos espoirs communs pour la Palestine de demain, nos perspectives englobent tous les Juifs vivant actuellement en Palestine qui acceptent de coexister avec nous de manière pacifique et sans discrimination.

76. En ma qualité officielle de président de l’OLP et de chef de la révolution palestinienne, j’invite les Juifs, tous les Juifs, à se détourner des promesses fallacieuses de l’idéologie sioniste et des dirigeants israéliens, car ces promesses ne conduisent qu’à la guerre sans fin, à de perpétuelles effusions de sang et à de continuelles angoisses.

77. Nous les invitons à quitter l’isolement moral dans lequel ils se trouvent pour un royaume plus ouvert, un royaume de libre choix et à écarter le complexe de Masada dans lequel leurs dirigeants actuels s’efforcent de les enfermer.

78. Nous leur offrons la solution la plus généreuse, qui nous permettrait de vivre ensemble, dans le cadre d’une paix juste dans notre Palestine démocratique.

79. En ma qualité officielle de président de l’OLP et de chef de la révolution palestinienne, je déclare que nous ne voulons pas verser une seule goutte de sang palestinien, arabe ou juif. Nous ne nous complaisons pas dans la poursuite des massacres, qui cesseront dès qu’une juste paix, conforme aux droits, aux espoirs et aux aspirations de notre peuple se sera définitivement établie.

80. En ma qualité officielle de président de l’OLP et de chef de la révolution palestinienne, je vous engage à vous joindre à la lutte de notre peuple pour son droit à l’autodétermination. Il s’agit là d’un droit consacré par la Charte des Nation unies et réaffirmé depuis par votre auguste assemblée à plusieurs reprises. Je vous invite à aider notre peuple à réintégrer la patrie dont il a été exilé par la force des armes, par la tyrannie et par l’oppression, afin que nous puissions recouvrer nos biens, notre terre et vivre dans notre patrie, libres et souverains, jouissant de tous les droits attachés à l’indépendance nationale. Ce n’est qu’à ce moment-là que nous pourrons déverser toutes nos ressources dans le courant de la civilisation, que l’esprit d’initiative palestinien pourra se consacrer au service de l’humanité et que notre Jérusalem retrouvera son rôle historique de haut lieu de toutes les religions.

81. Je fais appel à vous pour que vous mettiez notre peuple à même de s’établir sur sa propre terre en nation souveraine et indépendante.

82. Aujourd’hui, je suis venu porteur d’un rameau d’olivier et d’un fusil de combattant de de la liberté. Ne laissez pas le rameau d’olivier tomber de ma main. Je le répète : ne laissez pas le rameau d’olivier tomber de ma main.

83. La guerre embrase la Palestine, mais c’est aussi en Palestine que la paix renaîtra.

84. Le PRÉSIDENT (interprétation de l’arabe): Au nom de l’Assemblée générale, je voudrais exprimer nos sincères remerciements à M. Yasser Arafat, président du Comité exécutif de l’OLP et commandant en chef de la révolution palestinienne, pour sa remarquable et émouvante déclaration.

[Le Président poursuit en français)

85. Le PRÉSIDENT : Je propose à l’Assemblée générale que la liste des orateurs qui désirent prendre la parole sur le point 108 de l’ordre du jour soit close le vendredi 15 novembre 1974, à 17 heures. S’il n’y a pas d’objection, je considérerai que l’Assemblée générale accepte cette proposition.

Il en est ainsi décidé.

La séance est levée à 13 h 15.

A/PV.2282


Discours de Yosef Tekoah, représentant permanent d’Israël auprès des Nations unies

25. M. TEKOAH (Israël) [interprétation de l’anglais] : Je viens devant l’Assemblée générale au nom d’une nation qui, pendant vingt siècles, a lutté pour sa liberté, pour l’égalité et pour le rétablissement de son indépendance. Je viens ici pour parler au nom d’un peuple qui, ayant retrouvé, après un temps très long, sa liberté et sa souveraineté dans sa patrie, demeure attaqué, assiégé par ceux qui lui refusent les droits qui appartiennent à toutes les autres nations. Un tiers du peuple juif tout entier a été annihilé dans cette seconde guerre mondiale qui a donné naissance à l’Organisation des Nations unies. Un million de soldats juifs combattant dans les armées des Alliés et dans les rangs des partisans ont aidé à faire des Nations unies une réalité. Des représentants du peuple juif se trouvaient parmi ceux qui ont rédigé la Charte des Nations Unies.

26. Cela n’empêche pas, cependant, qu’aujourd’hui les États arabes, dont la plupart n’ont rien connu de cette lutte qui a rendu le monde sûr pour les Nations unies, ces États arabes dont certains des dirigeants ont collaboré avec les forces des ténèbres dans leur lutte contre les Nations unies, se trouvent à l’avant-garde de cet assaut fanatique contre le peuple juif, assaut qui réduit en cendres les idéaux des Nations unies

27. Le 14 octobre 1974, l’Assemblée générale a tourné le dos à la Charte des Nations unies, au droit et à l’humanité, et a virtuellement capitulé devant une organisation d’assassins dont le but est de détruire un État membre des Nations unies. Le 14 octobre, les Nations Unies ont arboré une enseigne se lisant ainsi : « Les assassins des enfants sont les bienvenus ici. »

28. Aujourd’hui, ces assassins se sont présentés à l’Assemblée générale, certains qu’elle se plierait à leurs désirs. Aujourd’hui, cette tribune a été souillée par le chef de ces assassins qui a proclamé que le sang juif ne s’arrêterait de couler que lorsque les exigences des meurtriers seront acceptées et leurs objectifs atteints.

29. Le 14 octobre, les Nations Unies et les gouvernements qui ont rendu possible l’invitation lancée à l’OLP sont devenus l’objet d’une critique qui s’étend au monde entier. Des éditoriaux et des caricatures dans la presse, des manifestations sur tous les continents ont exprimé le dégoût des gens devant le spectacle des Nations unies méprisant leurs propres principes et leurs propres préceptes et rendant hommage à l’assassinat et à la bestialité.

30. Aujourd’hui, ceux qui se sont rendus coupables d’assassinats et de bestialité sont venus ici recueillir les fruits de la reddition des Nations unies. Cette reddition doit être absolue, ont-ils dit au monde ce matin. La victime de l’assassinat et de la bestialité ne doit même pas pouvoir se défendre.

31. L’ONU a pour responsabilité de mener l’humanité loin de la guerre, loin de la violence et de l’oppression, vers la paix, vers l’entente internationale et le respect du droit des peuples et des hommes. Que reste-t-il de cette responsabilité maintenant que les Nations Unies se sont prosternées devant l’OLP qui s’est faite l’avocat de l’assassinat délibéré et prémédité de civils innocents, qui refuse au peuple juif le droit de vivre et qui cherche à détruire l’État juif par la force armée ?

32. Depuis de longues années, les Nations Unies se sont occupées des problèmes rencontrés par de nombreux peuples dans différentes parties du monde. Mais elles n’ont jamais, cependant, porté une attention aussi grande qu’aux habitants arabes de la Palestine.

33. Est-ce parce que les problèmes des autres ont été résolus ?

34. Les souffrances du peuple kurde, soumis à une guerre continue d’annihilation par le Gouvernement de l’Irak, ont-elles jamais été examinées et les droits de ce peuple ont-ils été soutenus par les Nations unies ? Cette organisation s’est-elle efforcée d’éviter le massacre de 500 000 Africains non musulmans dans le Soudan méridional ? Les droits fondamentaux de l’homme et les droits politiques de centaines de millions de ceux qui vivent sous des régimes totalitaires ont-ils été garantis par les Nations unies ?

35. Est-ce parce que les besoins des autres sont moins pressants et moins dignes d’intérêt que ceux des Palestiniens ?

36. Les Arabes de Palestine souffrent-ils de famine tout comme, selon les statistiques des Nations unies, quelque 500 millions de personnes en Asie, en Afrique et en Amérique latine ? Les, Nations unies ont-elles laissé les réfugiés palestiniens sans assistance comme ce fut le cas pour des dizaines de millions de réfugiés dans le monde, y compris les réfugiés juifs venus en Israël des pays arabes ? Les réfugiés palestiniens sont-ils les seuls à ne pouvoir être réintégrés comme l’ont été les autres ? Les Arabes palestiniens n’ont-ils pas leur propre État ? Qu’est la Jordanie, sinon un État arabe palestinien ?

37. La véritable raison de l’importance particulière accordée aux questions concernant les Arabes de Palestine, la seule en vérité, est l’exploitation constante de ces questions en tant qu’arme de la belligérance des Arabes contre Israël. Comme le roi Hussein l’a dit en parlant des dirigeants arabes : « Ils ont utilisé le peuple de Palestine à des fins politiques égoïstes. » Voilà également ce qui motive vraiment le présent débat.

38. En fait, aucune nation ne s’est vu accorder autant de droits politiques, aucune nation n’a reçu autant sur le plan du territoire, de la souveraineté et de l’indépendance que le peuple arabe.

39. La nation arabe, ayant une langue, une culture, une religion et une origine communes, a débordé de ses frontières, au VIIe siècle, et a conquis les peuples les uns après les autres jusqu’à ce que son domaine s’étende sur toute la péninsule arabe, sur le Croissant fertile et sur l’Afrique du nord.

40. Partout, dans ces régions, les anciennes cultures ont été remplacées par la civilisation arabe. Partout, à quelques exceptions près, les vaincus ont été intégrés à la nation arabe. Un peuple, cependant, s’est refusé à disparaître et à perdre son identité nationale. Que ce soit sur la terre d’Israël ou dans les régions devenues aujourd’hui le Yémen, l’Irak, la République arabe syrienne, l’Égypte, le Maroc, le peuple juif a maintenu sa personnalité nationale et a conservé sa culture et sa foi.

41. Aujourd’hui, à la suite de l’acquisition de territoires par la guerre, qui s’est prolongée pendant des centaines d’années, la nation arabe est représentée aux Nations Unies par vingt États souverains. Parmi eux, se trouve également l’État arabe palestinien de Jordanie.

42. Géographiquement et ethniquement, la Jordanie est la Palestine. Historiquement, les rives occidentale et orientale du Jourdain font partie de la terre d’Israël ou de la Palestine. Les deux rives étaient partie intégrante de la Palestine sous Mandat britannique jusqu’à ce que la Jordanie, puis Israël, soient devenus indépendants. La population de Jordanie se compose de deux éléments – la population sédentaire et les nomades. Tous deux sont, évidemment, palestiniens. Les Bédouins nomades constituent une minorité de la population jordanienne. En outre, la majorité des habitants sédentaires, même ceux de la rive orientale, sont, de par leur origine, des Palestiniens de la rive occidentale. Sans les Palestiniens, la Jordanie serait un État sans peuple.

43. C’est pourquoi, le 29 avril 1950, inaugurant la session commémorative du Parlement jordanien, le roi Abdullah a déclaré : « J’ouvre la session du Parlement alors que les deux rives du Jourdain sont unies par la volonté d’un peuple, d’une patrie et d’un espoir. »

44. Le 23 août 1959, le Premier Ministre de la Jordanie a déclaré : « Nous sommes le Gouvernement de la Palestine, l’armée de la Palestine et les réfugiés de la Palestine.

45. En fait, la très grande majorité des réfugiés palestiniens n’ont jamais quitté la Palestine mais, à la suite des guerres de 1948 et de 1967, ils se sont déplacés d’une région du pays à l’autre. En même temps, un nombre approximativement égal de réfugiés juifs quittaient les pays arabes pour se rendre en Israël.

46. Il est donc faux de prétendre que le peuple palestinien a été dépossédé de son propre État ou qu’il a été chassé de sa patrie. La plupart des Palestiniens continuent de vivre en Palestine. La plupart des Palestiniens continuent de vivre dans un État palestinien. La grande majorité des Arabes de Palestine sont citoyens de cet État palestinien.

47. « La Jordanie est la Palestine et la Palestine est la Jordanie », déclarait, le 9 décembre 1970, feu le Dr Kadri Toukan, éminent dirigeant de la rive occidentale et ancien ministre des affaires étrangères de la Jordanie.

48. M. Anwar Nuseibe, autre personnalité palestinienne de la rive occidentale et ancien ministre de la défense de la Jordanie, déclarait le 23 octobre 1970 :

« Les Jordaniens sont aussi des Palestiniens. Il s’agit d’un seul État. Il s’agit d’un seul peuple. Le nom n’a aucune importance. Les familles vivant à Salt, à Irbid et à Karak ne maintiennent pas seulement des liens familiaux et matrimoniaux avec les familles vivant à Nablus et à Hébron ; elles font partie d’un seul et même peuple. »

49. Ce fait est reconnu même par le pacte de l’OLP, et les résolutions de Rabat ne sauraient modifier cette réalité.

50. Même si l’appellation « Palestinien » était réservée à la rive occidentale, on constate aujourd’hui, comme je l’ai déjà dit, une prépondérance écrasante de Palestiniens de la rive occidentale provenant de la population de la rive orientale, de même d’ailleurs que parmi les membres du Gouvernement jordanien. La reine Alia, le premier ministre Rifai, plus de la moitié des membres du cabinet et des membres du Parlement, le porte-parole du Parlement, le maire d’Amman notamment, viennent de la rive occidentale.

51. Certains Palestiniens peuvent ne pas être satisfaits de leur forme de gouvernement, de la structure constitutionnelle de leur État ou de leurs dirigeants. Cela ne saurait cependant justifier l’assertion selon laquelle les Arabes palestiniens ont été privés de leurs droits en tant que peuple. Comme toutes les autres branches de la nation arabe, les Palestiniens eux aussi possèdent une entité politique dans le cadre de laquelle ils exercent leurs droits nationaux, politiques et culturels. Si certains de leurs besoins n’ont pas été pleinement satisfaits, si certains aspects de leur identité nationale n’ont pas encore reçu de solution, ces problèmes pourraient être traités dans le contexte de négociations entre Israël et son voisin occidental, l’État palestinien de Jordanie.

52. Dans ces conditions, il est évident que ceux qui ont pris l’initiative de ce débat sur la prétendue question de Palestine se préoccupent essentiellement non pas de la réalisation des droits des Palestiniens, mais de l’élimination des droits du peuple juif. La destruction d’Israël et le déni au peuple d’Israël de ses droits à l’autodétermination et à l’indépendance sont les objectifs officiellement énoncés par l’OLP, à la requête de laquelle les gouvernements arabes ont demandé que ce débat ait lieu. En agissant de la sorte, en prenant l’initiative d’adresser une invitation à l’OLP et en adoptant les décisions qui ont été prises à la récente Conférence de Rabat, les gouvernements arabes ont réaffirmé leur association avec l’organisation qui coiffe les bandes d’assassins arabes. Ce n’est guère surprenant. L’OLP ne vient pas de la communauté palestinienne ; elle ne représente pas la communauté palestinienne ; elle est la créature des gouvernements arabes eux-mêmes ; elle a été créée à la première réunion au sommet des chefs d’État arabes au Caire, en 1964, en tant qu’instrument d’une guerre de terrorisme contre Israël. Son pacte stipule que l’existence d’Israël est nulle et non avenue, que la revendication de liens historiques ou spirituels entre les Juifs et la Palestine ne s’accorde pas aux réalités historiques, que les Juifs ne sont pas un seul peuple ayant une entité indépendante. Dans la poursuite de ses objectifs, l’OLP emploie des méthodes barbares telles que l’assassinat délibéré de civils innocents. Il ne s’agit pas de pertes accidentelles de vies civiles survenues dans une attaque contre des objectifs militaires, mais d’assauts bestiaux soigneusement préparés de sang-froid délibéré contre des enfants, des femmes et des hommes innocents et sans défense, dans des villes et villages, dans des écoles et sur des marchés, dans des aéroports, dans l’air et au sol. Il n’est pas étonnant que les associations de combattants antinazis pour la liberté aient, à maintes reprises, condamné les atrocités de l’OLP qui rappellent les crimes de la barbarie nazie.

53. Le soutien accordé à l’idéologie meurtrière et aux sinistres objectifs de l’OLP trouve son expression aux Nations unies sous des formes diverses. Il est souvent fait allusion au « problème fondamental » de la question palestinienne, ce qui est un euphémisme pour désigner Israël en tant qu’État. Parfois les orateurs attaquent effrontément l’indépendance d’Israël, le qualifient calomnieusement de colonialiste, demandent qu’il soit remplacé par un deuxième État arabe palestinien qui s’ajouterait à la Jordanie. En d’autres occasions, les termes employés sont plus généraux ; par exemple, on parle alors du rétablissement des droits inaliénables du peuple palestinien, de son autodétermination. Depuis le 8 juin 1974, date de la réunion de l’OLP au Caire et la Conférence au sommet de Rabat, on ne parle que d’établir l’autorité de l’OLP sur les territoires arrachés à Israël, en indiquant clairement que ce ne serait qu’un premier pas vers l’extermination d’Israël.

54. Quels que soient les termes employés, l’intention demeure évidente.

55. Au cours d’une conférence de presse tenue au Siège des Nations Unies, après le vote de l’Assemblée générale, le 14 octobre 1974, le représentant de l’OLP a déclaré :

« Notre objectif à court terme, qui a été approuvé par notre congrès, consiste à établir dans toutes les parties libérées de la Palestine une autorité nationale, à condition que cette décision ne porte aucunement préjudice à notre droit sur l’ensemble de la Palestine. »

56. L’organe officiel du Gouvernement syrien, el-Baath, écrivait le 17 octobre 1974, au sujet de la résolution du 14 octobre portant invitation de l’OLP :

« La résolution des Nations Unies constitue une victoire du principe de la lutte armée qui a commencé dans la guerre de libération du 6 octobre. Il en est ainsi parce que le monde ne respecte que le langage de la violence révolutionnaire qui est le seul langage qu’on puisse utiliser à notre époque.

57. Yasser Arafat a rendu ce point de vue encore plus clair. Dans une interview publiée le 21 octobre 1974 dans le journal du Caire Rose el-Yussuf, il déclarait :

« Je ne vois pas la possibilité d’un règlement pacifique au Moyen-Orient sans une cinquième guerre. »

58. Le 28 octobre, les gouvernements arabes et l’OLP ont décidé, à Rabat, que l’objectif immédiat devait être l’établissement d’une base de l’OLP à l’est d’Israël. L’objectif final restait le même : la destruction d’Israël et son remplacement par un État arabe.

59. À une conférence de presse tenue à Rabat, le 30 octobre, Yasser Arafat a confirmé sans vergogne que c’était bien le sens de la décision adoptée deux jours auparavant. Il a dit que l’établissement de l’autorité de l’OLP dans les régions qui pourraient être évacuées par Israël serait « la première étape vers la création d’un État démocratique dans lequel les juifs, les chrétiens et les musulmans pourraient coexister ». Il a réitéré sa déclaration au cours d’interviews publiées dans le New York Times le 9 novembre, dans Time Magazine le 11 novembre, ainsi qu’en d’autres occasions récentes, y compris sa déclaration de ce matin [2282e séance]. Tout le monde a encore présentes à la mémoire les explications données par Arafat lui-même sur le fait que cette terminologie n’est employée que parce qu’elle est plus « civilisée » et que, derrière ces mots, se cache, comme toujours, le dessein de priver le peuple juif de son indépendance, de liquider l’État juif et d’établir sur ses ruines un autre État arabe dans lequel les Juifs vivraient encore en minorité, comme ils vivent aujourd’hui, persécutés et torturés, en Syrie, et comme ils ont vécu jadis dans des pays tels que l’Irak, le Yémen ou l’Algérie, en endurant toutes les douleurs et tous les chagrins de l’oppression.

60. Voilà donc l’objectif prétendument modéré du chef de l’OLP, l’homme qui dirige encore le Fatah-Septembre noir, le criminel qui a reçu 5 millions de dollars du président Kadhafi de la Libye comme récompense pour avoir massacré les sportifs israéliens aux Jeux olympiques de Munich, l’assassin qui a dirigé personnellement le meurtre des diplomates à Khartoum.

61. Certains de ses séides ne sont pas d’accord avec ses propos dits « civilisés ». Ils aimeraient qu’il soit plus net et plus catégorique, comme il l’a été lorsqu’il a déclaré à l’hebdomadaire italien Europa :

« Notre objectif est la destruction d’Israël… Pour nous, la paix signifie la destruction d’Israël et rien d’autre. »

62. Aujourd’hui, Arafat préfère la méthode employée par les nazis. Les nazis ont tué des millions de Juifs dans les camps de la mort, dont les grilles portaient l’inscription « le travail, c’est la liberté ». Arafat tue des enfants juifs et cherche à anéantir l’État juif en prétendant vouloir créer une « Palestine démocratique ». Ni les rois, ni les présidents, ni les artifices des déclarations, ni les applaudissements des partisans ou des dupes ne sauraient dissimuler cette sinistre réalité.

63. Les orateurs qui ont ouvert ce débat ont confirmé son but véritable : saper les droits d’Israël, mettre en doute le droit inaliénable du peuple juif à jouir de sa patrie, renforcer et encourager les activités de l’OLP contre l’existence d’Israël et de son peuple et établir un tremplin pour l’OLP, afin que cette organisation criminelle puisse poursuivre ses efforts en vue de détruire l’État juif. Voilà ce que la justice signifie pour l’OLP. Voilà la branche d’olivier tendue par l’OLP !

64. L’histoire juive est l’histoire d’un peuple qui est demeuré fidèle à sa terre pendant des milliers d’années d’indépendance et de conquêtes étrangères, de déracinement et de dispersion et de luttes pour reconstruire sa nation et restaurer enfin sa liberté nationale. Malgré des tragédies nationales sans précédent, des siècles d’oppression, des massacres répétés au cours des âges et dont l’apogée a été la génocide de six millions de Juifs par les nazis, l’attachement du peuple juif à sa patrie et sa détermination à y vivre dans la liberté et l’indépendance n’ont jamais diminué. Depuis le commencement de l’histoire, il y a des milliers d’années, jusqu’à la création de la Jordanie en tant que partie de la Palestine, aucun peuple, si ce n’est le peuple juif, n’avait jamais établi ou n’avait jamais pensé à établir son propre État sur la terre d’Israël. Aucun peuple, sauf le peuple juif, n’avait jamais considéré la terre d’Israël en tant qu’entité séparée. Mais pour la nation juive, cette terre a été l’essence même de son existence.

65. Même lorsqu’ils ont été battus par l’Empire romain et emmenés en tant qu’esclaves dans des pays étrangers, les Juifs de la diaspora ont continué à vivre en communion avec leur patrie. Ils ont prié pour qu’il pleuve lorsque la terre d’Israël avait besoin de pluie. Ils ont célébré la récolte lorsque c’était le temps des récoltes en Israël. Ils ont conservé les coutumes de leur terre, leurs fêtes traditionnelles et leur langue ancestrale. Par-dessus tout, ils n’ont jamais cessé de lutter contre les conséquences de l’oppression étrangère impérialiste. Ils n’ont jamais abandonné le combat pour retrouver leur indépendance et leur souveraineté. Au sein de la terre d’Israël elle-même, la communauté juive, bien qu’elle ait été décimée par des conquérants successifs, est demeurée attachée au sol de ses ancêtres, en sachant que le jour viendrait où elle pourrait de nouveau jouir de la liberté.

66. Si dans l’histoire mondiale il y a un exemple classique de la lutte pour acquérir la liberté nationale, c’est bien la lutte du peuple juif. Il s’agit d’une lutte qui a été menée pendant environ 2000 ans pour résister à l’impérialisme et au colonialisme, à l’exil et à la dispersion, ainsi qu’à la discrimination raciale et à l’annihilation physique. C’est un blasphème que de rabaisser cette lutte millénaire du sionisme, de mettre en doute l’égalité du peuple juif avec les autres nations, de dénier au peuple juif le droit à l’autodétermination et à l’indépendance dans sa patrie. Il s’agit d’un sacrilège contre les concepts les plus vénérés de l’égalité des peuples et de libération nationale. Le peuple juif, au cours des âges, a été constamment la victime de ce genre de traitement à la nazi par les hypocrites, les racistes et les antisémites. Il est triste de constater que ces préjugés antijuifs apparaissent maintenant aux Nations unies.

67. Le peuple juif, cependant, a défendu ses droits, a lutté et s’est battu dans le sang pendant des siècles, a survécu à des empires et à des holocaustes et ne s’est jamais laissé détourner de sa voie par des bandes d’assassins qui s’abreuvent du sang juif ou par les caprices de régimes qui prétendent demander que justice soit faite pour les Arabes de Palestine, mais qui, ouvertement, refusent cette justice aux Juifs.

68. Le choix qui se présente à l’Assemblée générale est clair : d’une part, nous avons la Charte des Nations unies. D’autre part, nous avons l’OLP, dont les sinistres objectifs, tels qu’ils sont définis dans son pacte, et les outrages barbares sont en violation de la Charte.

69. D’une part, nous avons Israël, qui est prêt et désireux d’aboutir à un règlement pacifique avec l’État arabe palestinien de la Jordanie et qui permettrait à l’identité nationale palestinienne de trouver sa pleine expression. D’autre part, nous avons l’OLP, qui dénie à Israël son droit à l’indépendance et au peuple juif son droit à l’autodétermination.

70. Le choix réside entre la compréhension et la poursuite du conflit au Moyen-Orient, entre la répression du terrorisme et son encouragement, entre la possibilité de satisfaire les besoins des Palestiniens grâce à un processus pacifique qui est déjà en cours ou le sabotage de ce processus en essayant d’introduire dans ce processus une organisation criminelle qui a pour objectif l’élimination de l’une des parties à la négociation.

71. La question est celle-ci : la paix doit-elle exister entre Israël et son voisin oriental ou doit-on s’efforcer d’établir une base de l’OLP à l’est d’Israël à partir de laquelle les terroristes pourraient poursuivre leur campagne contre l’existence même de l’État juif

72. Le 14 octobre dernier, l’Assemblée générale a opté pour l’OLP, elle a opté pour le terrorisme, elle a opté pour la sauvagerie. Peut-on espérer maintenant qu’elle pourra réparer le mal que, par cette décision, elle a porté à la cause de la paix au Moyen-Orient et à l’humanité en général ? Quant à Israël, il a déjà fait son choix.

73. Les Nations unies, dont le devoir est pourtant de combattre le terrorisme et la barbarie, accepteront peut-être de marcher avec. Pas Israël.

74. Les assassins des athlètes des Jeux olympiques de Munich, les bouchers des enfants de Ma’alot, les assassins des diplomates de Khartoum n’appartiennent pas à la communauté internationale. Ils n’ont pas de place dans les efforts de la diplomatie internationale. Israël fera en sorte qu’ils n’y trouvent pas place.

75. Israël poursuivra les assassins de l’OLP jusqu’à ce que justice soit faite. Il continuera à prendre des mesures contre leur organisation et leurs bases jusqu’à ce qu’il soit définitivement mis fin à leurs atrocités. Le sang des enfants juifs n’aura pas été versé impunément.

76. Israël ne permettra pas à l’OLP d’établir son autorité sur quelque partie que ce soit de la Palestine. L’OLP ne sera pas imposée aux Arabes palestiniens. Elle ne sera pas tolérée par les Juifs d’Israël.

77. Israël poursuivra ses efforts pour établir la paix avec les États arabes. La paix permettrait d’inaugurer une ère nouvelle de développement, de progrès social et de bonheur pour tous les États et pour tous les peuples du Moyen-Orient.

78. Par sa décision du 21 juillet 1974, le Gouvernement israélien a proclamé qu’il chercherait à ouvrir des négociations en vue d’un accord de paix avec la Jordanie et que dans l’État arabe jordano-palestinien, à l’est d’Israël, l’identité particulière des Jordaniens et des Palestiniens trouverait son expression dans la paix et le bon voisinage avec Israël. Cela demeure la politique d’Israël.

79. Cependant, si les négociations en vue de la paix devaient être paralysées à la suite des résolutions de Rabat et de l’Assemblée générale, Israël, en exerçant sa souveraineté, trouverait le moyen de garantir ses intérêts politiques et sa sécurité, tout en étant juste à l’égard de la population arabe qui vit dans les régions qu’il administre.

80. Aucune résolution de l’Assemblée générale ne saurait dissimuler le caractère meurtrier de l’OLP. Aucune résolution ne saurait laver les mains de Yasser Arafat et de ses hommes du sang de leurs victimes innocentes. Aucune résolution ne saurait conférer le respect à une bande d’égorgeurs. Aucune résolution ne saurait établir l’autorité d’une organisation qui n’en a pas, qui ne représente personne si ce n’est quelques milliers d’agents de la mort qu’elle emploie, lesquels ne sont chez eux en aucune partie des territoires qu’ils cherchent à dominer. L’OLP demeure ce qu’elle est, où elle est : hors la loi et hors de la Palestine.

81. Une résolution qui accepterait les demandes de l’OLP encouragerait, toutefois, les extrémistes du monde arabe qui repoussent un règlement pacifique avec Israël et demandent que l’on poursuive la guerre contre cet État.

82. Je répète qu’Israël est toujours prêt à s’engager dans la voie de la paix avec les États arabes. Cependant, si ces États devaient continuer à se livrer à l’hostilité et à l’agression, ils découvriraient qu’Israël est également prêt. L’indépendance du peuple juif sera sauvegardée avec la même détermination, la même persévérance, la même fermeté qu’avec lesquelles elle a été rétablie après une lutte millénaire et elle a été défendue depuis. L’hymne national juif, l’hymne national d’Israël dit :

« Pendant 2000 ans, nous avons chéri l’espoir

Que nous vivrons en liberté dans la terre

De Sion et à Jérusalem. »

À ceux qui, en cette assemblée, contestent ou ignorent nos droits, nous répliquons : le peuple d’Israël vivra désormais et à jamais dans la liberté.

A/PV.2283


Résolution 3236 (XXIX) de l’Assemblée générale

3236 (XXIX). Question de Palestine

L’Assemblée générale,

Ayant examiné la question de Palestine,

Ayant entendu la déclaration de l’Organisation de libération de la Palestine, représentant du peuple palestinien,

Ayant également entendu d’autres déclarations faites au cours du débat,

Gravement préoccupée par le fait qu’aucune solution juste n’a encore été trouvée pour le problème de Palestine et reconnaissant que ce problème continue de mettre en danger la paix et la sécurité internationales,

Reconnaissant que le peuple palestinien doit jouir du droit à l’autodétermination conformément à la Charte des Nations Unies,

Exprimant sa grave préoccupation devant le fait que le peuple palestinien a été empêché de jouir de ses droits inaliénables, en particulier de son droit à l’autodétermination,

S’inspirant des buts et principes de la Charte,

Rappelant ses résolutions pertinentes qui affirment le droit du peuple palestinien à l’autodétermination,

1. Réaffirme les droits inaliénables du peuple palestinien en Palestine, y compris :

a) Le droit à l’autodétermination sans ingérence extérieure ;

b) Le droit à l’indépendance et à la souveraineté nationales ;

2. Réaffirme également le droit inaliénable des Palestiniens de retourner dans leurs foyers et vers leurs biens, d’où ils ont été déplacés et déracinés, et demande leur retour ;

3. Souligne que le respect total et la réalisation de ces droits inaliénables du peuple palestinien sont indispensables au règlement de la question de Palestine ;

4. Reconnaît que le peuple palestinien est une partie principale pour l’établissement d’une paix juste et durable au Moyen-Orient ;

5. Reconnaît en outre le droit du peuple palestinien de recouvrer ses droits par tous les moyens conformément aux buts et principes de la Charte des Nations Unies ;

6. Fait appel à tous les États et organisations internationales pour qu’ils aident le peuple palestinien dans sa lutte pour recouvrer ses droits, conformément à la Charte ;

7. Prie le Secrétaire général d’établir des contacts avec l’Organisation de libération de la Palestine au sujet de toutes les affaires intéressant la question de Palestine ;

8. Prie le Secrétaire général de faire rapport à l’Assemblée générale, lors de sa trentième session, sur l’application de la présente résolution ;

9. Décide d’inscrire la question intitulée « Question de Palestine » à l’ordre du jour provisoire de sa trentième session.

2296e séance plénière

22 novembre 1974

A/RES/3236(XXIX)