L’allocution du 25 août 1944 : le texte et son interprétation

L’historien et les mémoires de la Seconde Guerre mondiale en France


Le 25 août 1944, à l’Hôtel de Ville, de Gaulle présente la libération de Paris, « libéré par lui-même », comme l’œuvre « de la France tout entière, de la France qui se bat, de la seule France, de la vraie France, de la France éternelle ». Selon l’historien Henry Rousso (né en 1954), le président du GPRF pose ce jour-là la « première pierre du mythe fondateur de l’après-Vichy ». Il évoque certes l’action des Alliés, mais la présente comme un simple « concours » et place la France dans le camp des vainqueurs. Il rejette dans l’ombre le régime de Vichy et la guerre franco-française, se bornant à mentionner l’existence de « quelques malheureux traîtres qui se sont livrés à l’ennemi ou lui ont livré les autres et qui connaissent ou connaîtront la rigueur des lois ». Il ne dit rien non plus des républicains espagnols de la 9e compagnie du régiment de marche du Tchad (2e DB) entrés les premiers dans Paris dans la soirée du 24. La mémoire gaullienne est « résistancialiste » puisqu’elle insiste sur le souvenir de la Résistance. De Gaulle associe la France tout entière à la Résistance, et la Résistance à l’action qu’il a conduite lui-même depuis 1940. Il présente la Libération comme le terme d’une « guerre de Trente Ans » afin d’occulter les particularités du second conflit mondial, celles d’une guerre franco-française. Il affirme que la République n’a jamais cessé d’être, conformément à la thèse de la continuité républicaine . Il entend affirmer sa propre légitimité, comme celle de son gouvernement en France et celle de la France dans le camp des vainqueurs. Lors du colloque de Rennes sur les mémoires des comportements sous l’Occupation (2-3 avril 2014), l’historien Pierre Laborie (1936-2017) s’interroge néanmoins sur la signification habituellement donnée à l’anaphore du 25 août : « Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! Mais Paris libéré ! Libéré par lui-même… ». Prononcée le jour de la libération de Paris, en présence des membres du CNR et du Comité parisien de la Libération, l’allocution identifie peut-être la France à la Résistance, mais lui fixe avant tout des devoirs, et ne fait pas de tous les Français des résistants. Après la Libération, de Gaulle décrit au contraire la Résistance comme le fait d’une élite, ce qui n’exclut pas l’assentiment de la masse. L’historiographie de l’immédiat après-guerre ne fait pas elle non plus de la majorité des Français des résistants. « Les Résistants n’ont jamais été qu’une minorité » écrit Henri Michel, en 1950, dans la conclusion de son Que sais-je ? sur la Résistance.

L’historien et les mémoires de la Seconde Guerre mondiale en France


Un extrait de l’allocution sur le site Gouvernement.fr

N.B. : l’allocution n’est pas prononcée « place de l’Hôtel de Ville », mais dans le salon du premier étage.


Le texte du discours dans Ce soir du 27 août 1944

GALLICA – BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE

L’ennemi n’est pas encore abattu, il reste sur notre territoire. Mais il ne suffira pas que nous l’ayons, avec le concours de nos chers et admirables alliés, chassé de chez nous, pour que nous nous tenions pour satisfaits, nous voulons, sur son territoire, entrer, comme il se doit, en vainqueurs.

Le chef du gouvernement provisoire de la République française prononçait, à son arrivée à l’Hôtel de Ville, un important discours dont voici le texte :

« Pourquoi voulez-vous que nous dissimulions l’émotion qui nous étreint tous, hommes et femmes, qui sommes ici chez nous, dans Paris libéré, debout ? Non, nous ne dissimulerons pas ici cette émotion profonde et sacrée. Il y a là des minutes dont nous savons tous qu’elles dépassent chacune de nos pauvres vies. Paris, Paris outragé, Paris brisé, Paris martyrisé, mais Paris libéré, libéré par lui-même, libéré par son peuple, avec le concours des armées de la France, avec l’appui et le concours de la France qui se bat c’est-à-dire la vraie France, la France éternelle.
« Eh bien ! puisque Paris est libre puisque l’ennemi qui le tenait a capitulé dans nos mains, la France rentre à Paris chez elle. Elle y rentre sanglante, mais elle y rentre bien résolue. Elle y rentre éclairée par d’amères leçons, mais elle y rentre plus certaine que jamais de ses devoirs et de ses

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Après l’harassante journée d’hier, le général de Gaulle a passé la nuit rue Saint-Dominique, au ministère de la Guerre, où il est arrivé, hier soir, avec son entourage : Thierry d’Argenlieu, Jean Marin et de nombreuses personnalités.
Après la cérémonie au tombeau du Soldat inconnu, le général se rend à l’Hôtel de Ville où on l’attend dans le courant de l’après-midi.

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droits. J’ai dit d’abord de ses devoirs, ce qui exprime tout pour le moment. Nous savons qu’il s’agit de la guerre. L’ennemi n’est pas encore abattu, il en reste sur notre territoire. Mais il ne suffira pas que nous l’ayons, avec le concours de nos chers et admirables alliés, chassé de chez nous, pour que nous nous tenions pour satisfaits. Nous voulons sur son territoire entrer, comme il se doit, en vainqueurs.

« C’est pour cela que l’avant- garde française est entrée à Paris coups de canon. C’est pour cela que la grande armée française d’Italie a débarqué dans le Midi et remonte rapidement la vallée du Rhône. C’est pour cela que nos braves et chères forces de l’intérieur vont devenir des unités bien armées. C’est pour avoir cette revanche, cette vengeance, que nous saurons continuer de nous battre jusqu’au dernier jour, jusqu’au jour de la victoire complète et totale, la seule qui saura nous satisfaire. Ce devoir de guerre, tous les hommes qui sont ici et ceux qui nous entendront en France, savent bien qu’il comporte d’autres devoirs, dont le principal s’appelle l’unité nationale.
« La nation n’admettrait pas, dans la situation où elle se trouve, que cette unité soit rompue. La nation sait bien que pour vaincre, pour se reconstruire et pout être grande, il lui faut avoir avec elle tous ses fils. La nation sait bien que ses fils et ses filles, hormis quelques malheureux traîtres, qui se sont livrés à l’ennemi ou lui ont livré les autres et qui connaîtront la rigueur des lois, tous les fils de France marchent et marcheront pour le combat de la France, la main dans la main.

« Je dis ici puisqu’il faut qu’on l’entende après ce qui s’est passé depuis quatre ans après l’abdication que vous savez, et après l’usurpation odieuse, il n’y a pas d’autre moyen pratique et acceptable pour que le peuple fasse entendre sa voix que le suffrage universel et libre de tous les Français et toutes les Françaises, dès que les conditions de vie de la nation permettront de passer la parole au peuple, c’est-à-dire au souverain.

« Nous ne voulons plus que la nation, puisse redouter la faim, la misère, le lendemain, nous voulons des Français dignes et des Françaises dignes d’eux-mêmes, dignes d’elles-mêmes et du pays. Nous voulons pour chacun en France des conditions d’existence qui soient à la hauteur de ce qu’un homme et une femme sont en droit de réclamer.

« Enfin la France a des droits au dehors. La France est une grande nation. Elle l’a prouvé je pense, et nous n’avons qu’à regarder autour de nous. Nous voilà debout, rassemblés, noue voilà parmi les vainqueurs, et ce n’est pas fini. Cette nation a des droits, et ces droits elle saura les faire valoir. Elle a le droit d’assurer sa sécurité. Elle a le droit d’être parmi les grandes nations qui vont faire la paix du monde. Elle a le droit de se faire entendre dans toutes les parties de la terre, elle est une grande puissance mondiale. Elle fera toujours en sorte que les autres en tiennent compte, puisque cela est de l’intérêt suprême, de l’intérêt de l’humanité. Voilà ce que nous voulons faire, autour du gouvernement : la guerre, l’unité et la grandeur. Voilà notre programme. Je n’ai qu’à vous regarder tous pour savoir de la manière la plus certaine que c’est celui de tous les Français. Il entraînera bien des difficultés. Il en entraînera spécialement à Paris. Ce n’est pas du jour au lendemain que nous pourrons rendre à toute la France sa place d’autrefois, que nous pourrons retrouver la grandeur séculaire de notre pays. Nous aurons bien des obstacles à surmonter. Le Gouvernement fera son devoir comme la nation doit exiger qu’il le fasse. Ainsi, j’en suis sûr, irons-nous vers des jours meilleurs, non seulement pour le pays mais pour chacun des enfants qui se retrouveront dans cette génération Nous n’avons pas d’autre chose à vouloir que de nous montrer, jusqu’à la fin, dignes de la France.

« Vive la France. »

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Le texte du discours dans L’Écho d’Alger du 27 août 1944

GALLICA – BIBLIOTHÈQUE NATIONALE DE FRANCE

L’article dans son entier dans la bibliothèque numérique Gallica

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Le texte du discours dans le Bulletin municipal du 30 août 1944

Dans son édition du 30 août 1944, le Bulletin municipal officiel de la Ville de Paris reproduit les trois allocutions prononcées à l’occasion de la réception du général de Gaulle, celle de Georges Marrane, au nom du Comité parisien de Libération, celle de Georges Bidault, président du Conseil national de la Résistance, celle du général de Gaulle.

D’une voix forte, le général de Gaulle prend la parole.

« Il est inutile, dit-il, de dissimuler l’émotion qui nous étreint tous à nous retrouver dans un Paris libéré par ses propres mains. C’est une minute dont la grandeur dépasse nos vies.

« Paris martyr, mais libéré par son peuple, lutte avec toute la France, avec celle qui se bat, je veux dire avec la France éternelle.

« Après la capitulation allemande, la France qui rentre chez elle à Paris est éclairée sur ses devoirs et sur ses droits.

« Je dis “devoirs”, car la guerre continue : l’Allemand chancelle mais n’est pas abattu. Nous voulons entrer en vainqueur chez lui. C’est une avant-garde française que vous voyez à Paris : le gros de nos armées remonte en ce moment la vallée du Rhône. Pour concourir à la victoire, les FFI et nos soldats en uniforme sauront continuer à se battre.

« Nous savons tous qu’il est un autre devoir, qui est de maintenir l’unité nationale. La nation unanime ne doit pas rompre aujourd’hui son unité ; il lui faut réunir autour d’elle tous ses enfants, hormis quelques traîtres ; il faut que nous marchions tous d’un même pas.

« Cette discipline que le gouvernement réclame n’empêche pas la France de réclamer ses droits. Il faut rendre la parole au peuple, c’est-à-dire au souverain, en rétablissant un suffrage universel et libre.

« Nous voulons, de plus, que dans la nation retrouvée aucun homme n’ait à redouter la faim ni la misère. Nous voulons que les Français aient les conditions d’existence dignes qu’ils sont en droit de réclamer.

« La France a aussi des droits extérieurs La France est une grande nation ! Nous voilà à nouveau debout en vainqueurs. Nous avons droit à la sécurité pour que notre pays ne soit plus jamais envahi comme il l’a été si souvent. Il doit se trouver au premier rang parmi les grandes nations qui seront chargées de l’organisation de la paix.

« La France le sait, les autres nations devront tenir compte de ses droits dans l’intérêt même de l’humanité.

« Guerre, unité, grandeur, je sais que c’est votre programme. Marchons donc malgré toutes les difficultés ; le temps saura rendre à la France ses traits pacifiques.

« Le gouvernement provisoire de la République fera son devoir pour qu’il en soit ainsi. Nous irons vers des jours meilleurs pour la patrie. Nous qui avons vécu la plus grande heure de son histoire, nous devons nous montrer dignes de la France.

« Vive la France ! »

Le Bulletin municipal du 30 août 1945 dans la bibliothèque numérique Gallica

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Le texte du discours dans les Discours et messages publiés par Berger-Levrault en 1946

Le discours proprement dit est précédé d’une note de présentation rédigée par l’auteur.

« Le 25 août, Paris est libéré par l’action conjuguée de la police parisienne, des forces de l’intérieur levées dans la capitale et de la division blindée du général Leclerc qui a brisé les positions allemandes dans la banlieue sud et les derniers centres de résistance de l’ennemi au Majestic, au Luxembourg, au Palais-Bourbon, rue Royale, etc. Le général de Gaulle fait son entrée dans la ville à 4 heures du soir par la porte d’Orléans. Il va d’abord à la gare Montparnasse, où le général Leclerc reçoit la capitulation du commandant des forces allemandes de Paris, et donne ses ordres pour assurer la couverture de la capitale vers le nord. Il s’installe ensuite au ministère de la Guerre, rue Saint-Dominique, et y établit le siège de la présidence du gouvernement. Après une visite à la Préfecture de police, où ont commencé les combats pour la libération de Paris, le général de Gaulle se rend à l’Hôtel de Ville où l’attendent la municipalité provisoire (Comité parisien de la Libération), le Comité national de la Résistance, des détachements de combattants ainsi qu’une foule immense. Après les discours que lui adressent M. Marrane, au nom du Comité parisien de la Libération, et M. G. Bidault, président du Comité national de la Résistance, il prononce l’allocution improvisée que voici : »

Pourquoi voulez-vous que nous dissimulions l’émotion qui nous étreint tous, hommes et femmes, qui sommes ici, chez nous, dans Paris debout pour se libérer et qui a su le faire de ses mains. Non ! nous ne dissimulerons pas cette émotion profonde et sacrée. Il y a là des minutes qui dépassent chacune de nos pauvres vies.

Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! mais Paris libéré ! libéré par lui-même, libéré par son peuple avec le concours des armées de la France, avec l’appui et le concours de la France tout entière, de la France qui se bat, de la seule France, de la vraie France, de la France éternelle.

Eh bien ! puisque l’ennemi qui tenait Paris a capitulé dans nos mains, la France rentre à Paris, chez elle. Elle y rentre sanglante, mais bien résolue. Elle y rentre, éclairée par l’immense leçon, mais plus certaine que jamais, de ses devoirs et de ses droits.

Je dis d’abord de ses devoirs, et je les résumerai tous en disant que, pour le moment, il s’agit de devoirs de guerre. L’ennemi chancelle mais il n’est pas encore battu. Il reste sur notre sol. Il ne suffira même pas que nous l’ayons, avec le concours de nos chers et admirables alliés, chassé de chez nous pour que nous nous tenions pour satisfaits après ce qui s’est passé. Nous voulons entrer sur son territoire comme il se doit, en vainqueurs. C’est pour cela que l’avant-garde française est entrée à Paris à coups de canon. C’est pour cela que la grande armée française d’Italie a débarqué dans le Midi et remonte rapidement la vallée du Rhône. C’est pour cela que nos braves et chères forces de l’intérieur vont s’armer d’armes modernes. C’est pour cette revanche, cette vengeance et cette justice, que nous continuerons de nous battre jusqu’au dernier jour, jusqu’au jour de la victoire totale et complète. Ce devoir de guerre, tous les hommes qui sont ici et tous ceux qui nous entendent en France savent qu’il exige l’unité nationale. Nous autres, qui aurons vécu les plus grandes heures de notre Histoire, nous n’avons pas à vouloir autre chose que de nous montrer, jusqu’à la fin, dignes de la France.

Vive la France !

De Gaulle, Discours et messages, 1940-1946, Berger-Levrault, 1946, pp. 474-476.

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La transcription de l’enregistrement

On suit ici un enregistrement joint au premier numéro hors-série des Collections de L’Histoire. Sa durée est de 6 min 26, y compris la note de présentation reproduite ci-dessus. Il ne couvre que la première partie de l’allocution, mais il est plus complet que l’extrait reproduit dans l’anthologie de Frémeaux & Associés (2000).

Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! mais Paris libéré ! libéré par lui-même, libéré par son peuple avec le concours des armées de la France, avec l’appui et le concours de la France tout entière, c’est-à-dire de la France qui se bat, c’est-à-dire de la seule France, de la vraie France, de la France éternelle.

Eh bien ! puisque Paris est libéré, puisque l’ennemi qui le tenait a capitulé dans nos mains, la France rentre à Paris, chez elle. Elle y rentre sanglante, mais elle y rentre bien résolue. Elle y rentre, éclairée par d’immenses leçons, mais elle y rentre plus certaine que jamais de ses devoirs et de ses droits.

Je dis d’abord de ses devoirs, et je les exprimerai tous pour le moment en disant qu’il s’agit de la guerre. L’ennemi chancelle. L’ennemi n’est pas encore abattu. Il en reste sur notre territoire. Et il ne suffira pas que nous l’ayons, avec le concours de nos chers et admirables alliés, chassé de chez nous pour que nous nous tenions pour satisfaits après ce qui s’est passé. Nous voulons sur son territoire entrer comme il se doit en vainqueurs.

C’est pour cela que l’avant-garde française est entrée à Paris à coups de canon. C’est pour cela que la grande armée française d’Italie a débarqué dans le Midi et remonte rapidement la vallée du Rhône. C’est pour cela que nos braves et chères forces de l’intérieur vont devenir des unités modernes. C’est pour avoir cette revanche, cette vengeance et en même temps cette justice, que nous saurons continuer de nous battre jusqu’au dernier jour, jusqu’au jour de la victoire totale et complète, la seule qui puisse nous satisfaire. Ce devoir de guerre, tous les hommes qui sont ici, tous ceux qui nous entendront en France, savent bien qu’il comporte d’autres devoirs dont le principal s’appelle l’unité nationale.

La nation n’admettrait pas, dans la situation où elle se trouve, que cette unité-là soit rompue. La nation sait bien qu’il lui faut, pour vaincre, pour se reconstruire et pour être grande, qu’il lui faut avoir avec elle tous ses enfants. La nation sait bien que ses fils et ses filles, tous ses fils et toutes ses filles, hormis quelques malheureux traîtres qui se sont livrés à l’ennemi ou lui ont livré les autres et qui connaissent ou connaîtront la rigueur des lois, hormis ceux-là, tous les fils et toutes les filles de la France marchent et marcheront fraternellement pour les buts de la France, la main dans la main.

Les grands discours du général de Gaulle, juin 1940-avril 1969, CD audio joint à « Les années de Gaulle », Les collections de L’Histoire, hors-série no 1, février 1998.

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Une version intégrale conservée par Jean-Louis Crémieux-Brilhac

Une version complète du discours est publiée par Jean-Louis Crémieux-Brilhac dans Ici Londres : les voix de la liberté, 1940-1944, La Documentation française, 1975, et reprise par Pierre Laborie, « Les comportements collectifs et la mémoire gaulliste : mots et usages », in Jacqueline Sainclivier, Jean-Marie Guillon et Pierre Laborie (Sous la direction de), Images des comportements sous l’Occupation. Mémoires, transmission, idées reçues, Rennes, PUR, 2016.

Pourquoi voulez-vous que nous dissimulions l’émotion qui nous étreint tous, hommes et femmes, qui sommes ici, qui sommes ici chez nous, dans Paris, levé, debout pour se libérer et qui a su le faire de ses mains ! non, nous ne dissimulerons pas cette émotion profonde et sacrée. Il y a là des minutes, nous le sentons tous, qui dépassent chacune de nos pauvres vies.

Paris, Paris outragé, Paris brisé, Paris martyrisé, mais Paris libéré ! Libéré par lui-même, libéré par son peuple, avec le concours des armées de la France, avec l’appui et le concours de la France tout entière c’est-à-dire de la France qui se bat, c’est-à-dire de la vraie France, de la France éternelle. (Applaudissements.)

Eh bien, puisque Paris est libéré, puisque l’ennemi qui le tenait a capitulé dans nos mains, la France rentre à Paris chez elle. Elle y rentre sanglante, mais elle y rentre bien résolue, elle y rentre éclairée par d’immenses feux, mais elle y rentre plus certaine que jamais de ses devoirs et de ses droits.

Je dis d’abord de ses devoirs, et je les exprimerai tous pour le moment en disant qu’il s’agit de la guerre. L’ennemi chancelle mais il n’est pas encore battu, il reste sur notre sol. Il ne suffira même pas que nous l’ayons, avec le concours de nos chers et admirables alliés, chassé de chez nous pour que nous nous tenions pour satisfaits après ce qui s’est passé. Nous voulons sur son territoire entrer, comme il se doit, en vainqueurs. (Applaudissements.)

C’est pour cela que l’avant-garde française est entrée à Paris à coups de canon ; c’est pour cela que la grande armée française d’Italie a débarqué dans le Midi et remonte rapidement la vallée du Rhône ; c’est pour cela que nos braves et chères Forces de l’Intérieur veulent devenir des unités modernes ; c’est pour avoir cette revanche, cette vengeance et en même temps cette justice, que nous saurons continuer de nous battre jusqu’au dernier jour, jusqu’au jour de la victoire finale et complète.
Ce devoir de guerre, tous les hommes qui sont ici, tous ceux qui nous entendront en France savent bien qu’ils comportent d’autres devoirs, dont le principal s’appelle l’unité nationale.

La nation ne permettrait pas dans la situation où elle se trouve que cette unité-là soit rompue. La nation sait bien qu’il lui faut, pour vaincre et pour se reconstruire et pour être grande, qu’il lui faut avoir avec elle tous ses enfants. La nation sait bien que ses fils et ses filles, tous ses fils et toutes ses filles, hormis quelques malheureux traîtres qui se sont livrés à l’ennemi et lui ont livré les autres, et qui connaissent et connaîtront la rigueur des lois, hormis ceux-là, tous les fils et toutes les filles de France marchent et marcheront fraternellement pour les buts de la France, la main dans la main. (Applaudissements.)

C’est cette grande, noble discipline nationale que le gouvernement réclame de tous les citoyens. Cette grande et noble discipline nationale n’empêche pas, bien au contraire, la nation d’avoir conscience de ses droits. Je dis ici, parce qu’il faut qu’on l’entende, qu’après ce qui s’est passé en 40, après l’abdication que vous savez, et après l’usurpation odieuse, il n’y a pas d’autre voie pratique et acceptable, pour que le peuple fasse entendre sa voix, que le suffrage universel libre de tous les Français et de toutes les Françaises, dès que les conditions dans lesquelles se trouve la nation permettront de passer la parole au peuple, c’est-à-dire au souverain. (Vifs applaudissements et bravos.)

Et les droits de la France, c’est-à-dire ses droits intérieurs, les droits qui intéressent tous ses enfants et qui par conséquent l’intéressent elle-même d’une façon vitale, nous ne voulons plus, quand nous aurons la possibilité de le faire, nous ne voulons plus que dans la nation, aucun homme, aucune femme puisse redouter la faim, la misère, les lendemains. Nous voulons des Français et des Françaises dignes, dignes d’eux-mêmes, dignes d’elles-mêmes et dignes du pays. Nous voulons pour chacun en France des conditions d’existence qui soient à la hauteur de ce qu’un homme et une femme ont le droit de réclamer. (Applaudissements.)

Enfin, la France a des droits au dehors. La France est une grande nation. Elle l’a prouvé comme au temps où nous n’avions pas la mer autour de nous. Nous nous en sommes bien aperçus, mais nous voilà, nous voilà debout rassemblés, nous voilà parmi les vainqueurs. Et ce n’est pas fini. Cette grande nation-là a le droit d’être en sécurité ; elle a le droit d’exiger de n’être plus jamais envahie par l’ennemi qui l’a fait tant de fois ; elle a le droit d’être au premier rang parmi les grandes nations qui vont organiser la paix et la vie du monde ; elle a le droit de se faire entendre dans toutes les parties de la terre. Elle est une grande puissance mondiale, elle le peut, elle saura faire en sorte que les autres en tiennent compte, parce que cela est de l’intérêt suprême, je veux dire de l’intérêt de l’Humanité. (Acclamations et applaudissements prolongés.)
Voilà ce que nous devons faire : autour du gouvernement, la guerre, l’unité et la grandeur. Voilà notre programme. Je n’ai qu’à vous regarder pour savoir, de la manière la plus certaine, que c’est celui de tous les Français. Par conséquent, marchons.

Il arrivera bien des difficultés. Il en arrivera spécialement à Paris. Ce n’est pas du jour au lendemain que nous pourrons rendre à Paris et à la France sa richesse, son aisance, ses facilités d’autrefois. Ce n’est pas aujourd’hui que nous pourrons remettre sur la figure de notre pays le traits pacifiques qui furent séculairement les siens. Nous aurons donc bien des obstacles à surmonter, bien des difficultés à vaincre. Le gouvernement fera son devoir. Toute la nation doit exiger qu’il le fasse. Ainsi irons-nous vers des jours plus heureux. Quant à nous, qui aurons vécu les plus grandes heures de notre Histoire, nous n’avons pas à vouloir autre chose que de nous montrer, jusqu’à la fin, dignes de la France. (Acclamations.)

Pierre Laborie, « Les comportements collectifs et la mémoire gaulliste : mots et usages », in Jacqueline Sainclivier, Jean-Marie Guillon et Pierre Laborie (Sous la direction de), Images des comportements sous l’Occupation. Mémoires, transmission, idées reçues, Rennes, PUR, 2016, pp. 34-35.

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Le sens et la portée du discours selon l’historien Henry Rousso

En quelques phrases, le 25 août 1944, le général de Gaulle a posé d’emblée la première pierre du mythe fondateur de l’après-Vichy. Fort de sa légitimité, il va inlassablement chercher à écrire et réécrire l’histoire des années de guerre, en proposant une vision issue de son seul imaginaire.

À l’instar de Paris, le reste du pays se serait libéré tout seul : dans le discours du 25 août à l’Hôtel de Ville, il n’évoque que tardivement « nos chers et admirables alliés ». Il parle peu de la « Résistance » et des résistants, forces contingentes dans le temps. Le salut émane de la « France éternelle », l’abstraction qui constitue l’une des clés de voûte de la symbolique gaullienne. Ainsi, première image-force, la défaite militaire de 1940 a été effacée par les armes et par la nation tout entière. Et, comme toute représentation à valeur collective, elle n’est pas entièrement dénuée de sens objectif, puisque c’est une division française qui est entrée la première dans Paris (grâce à lui) et qu’une bonne partie du territoire, notamment le Sud-Ouest, n’a pratiquement pas vu de soldats alliés.

Mais alors, si la « France » est intacte, quelle place accorder dans ce système à Vichy et à la collaboration ? La réponse est tout aussi immédiate. Ce même 25 août, Georges Bidault, entouré du Conseil national de la Résistance qu’il préside et du Comité parisien de Libération, est venu demander au chef de la France libre de « proclamer solennellement la République devant le peuple ici rassemblé ». Cela lui vaut une réplique sans appel :

« La République n’a jamais cessé d’être. La France libre, la France combattante, le Comité français de Libération nationale l’ont, tour à tour, incorporée. Vichy fut toujours et demeure nul et non avenu. Moi-même suis le président du gouvernement de la République. Pourquoi irais-je la proclamer ? »

La réponse est bien sûr politique. D’après Georges Bidault, dans ses Mémoires parus après la guerre d’Algérie, le CNR et lui-même, ne connaissant pas la teneur du discours que de Gaulle allait prononcer sur le balcon de l’Hôtel de Ville, ont souhaité « écarter d’emblée tout malentendu ». Mais elle illustre la mise entre parenthèses de Vichy. […]

La « guerre de trente ans » est une autre composante majeure de la symbolique gaullienne. L’assimilation entre les deux guerres mondiales permet d’insister sur le facteur militaire, donc d’éroder les particularités de la seconde : poids des résistances sans uniforme, des luttes idéologiques, du génocide. Il est vrai que les déportés ne sont pas encore rentrés et que la guerre, à laquelle participe une armée française régulière, n’est pas terminée. Elle tente également de tirer un trait sur les divisions internes, par un appel à l’unité, voire à l’« union sacrée ». Étroitement liées aux « invasions », les luttes fratricides n’ont plus de raison d’être une fois l’ennemi battu. Ce qui laisse dans l’ombre les causes proprement internes de la lutte entre partisans et adversaires du nazisme, que le Général n’a pas le désir de nier. Elle anticipe enfin sur la victoire, celle de 1945 résonnant comme l’écho de celle de 1918, qui fut, elle, incontestable et vierge de tout sentiment de malaise ou de honte.

Cette vision cohérente et relativement fermée sur elle-même constitue ce qu’on peut appeler le « résistancialisme gaullien », qui se définit moins comme une glorification de la Résistance (et certainement pas des résistants), que comme la célébration d’un peuple en résistance que symbolise l’homme du 18 juin, sans l’intermédiaire ni des partis, ni des mouvements, ni d’autres figures de la clandestinité. Elle tente de se superposer à la réalité autrement plus complexe et composite de l’Occupation. Son objectif inavoué était d’interpréter le passé en fonction des urgences du présent. Mais de Gaulle ne pouvait à lui seul gérer à la fois les impératifs du rétablissement de l’ordre républicain et fournir une image lisse d’événements troubles vécus par des millions de Français, souvent dans des situations fort différentes. Le mythe, partie intégrante du gaullisme, est amorcé, mais ne sera réellement installé que bien plus tard, et pour peu de temps.

Henry Rousso, Le Syndrome de Vichy, Paris, Seuil, 1990, première édition 1987, pp. 30-32.

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Le sens et la portée du discours selon l’historien Pierre Laborie

Depuis les années 1970, le discours convenu répète qu’après Vichy et la collaboration, pendant trois décennies, les Français ont vécu avec de « consolantes certitudes », grosses d’oublis. L’une d’entre elles ferait d’eux un peuple quasi unanime dans sa volonté quotidienne de lutte, affirmation poussée jusqu’à la galéjade avec la caricature des « 40 millions de résistants ». Légende rose propice aux sarcasmes, dénoncée à juste titre comme une fable, et sans doute fabriquée en partie par ses détracteurs. De façon moins simpliste, des historiens affirment la réalité et l’influence prépondérante d’un résistancialisme gaullien — ou gaullo-communiste — qui aurait caractérisé, jusqu’à la période 1970-1980, la mémoire dominante des années noires. […]

Sur l’origine et la construction de cette représentation d’une nation exemplaire, voire héroïque, un rôle déterminant est attribué au général de Gaulle, à la force du verbe, à son prestige et à son idée de la France. Il aurait fait don de la Résistance aux Français. Au prix d’un mensonge qualifié tantôt de sublime, tantôt de patriotique, ou les deux à la fois, mais en accord sur ce point avec la mémoire communiste, il leur aurait fait croire qu’ils avaient résisté en masse et qu’ils s’éraient libérés par eux-mêmes.

Cette analyse est en partie légitimée par plusieurs historiens. Elle attribue une influence exceptionnelle à l’homme du gaullisme de guerre et elle lui assigne un poids décisif dans la fabrication du rapport au passé. Présente dans de nombreux manuels scolaires, relayée et vulgarisée par le discours mémorio-médiatique, elle s’est progressivement installée comme une vérité d’évidence, composante de la vulgate sur le comportement d’ensemble de la population. Elle ajoute qu’il a fallu attendre la rupture culturelle des années post-1970, et son travail de déconstruction, pour que l’imposture soit enfin mise au jour et décryptée.

Les déclarations publiques du général de Gaulle, pendant et après l’été 1944, sont convoquées pour confirmer qu’elles ont institué, par leur répétition, la réalité du grand récit qui ferait de l’immense majorité des Français des résistants. Récit dans lequel ils se seraient reconnus, et auquel ils auraient durablement adhéré. Une importance majeure est attribuée à l’allocution du 25 août 1944 à l’Hôtel de Ville de Paris, dans l’émotion et l’effervescence des événements. Un court passage est régulièrement cité comme le texte fondateur du conte sur la France héroïque. C’est le célèbre « Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! Mais Paris libéré ! Libéré par lui-même… », montré et entendu des milliers de fois. […]

Il serait lassant de recenser les commentaires assurant que le général de Gaulle, en pleine libération de Paris, avait posé « la première pierre du mythe fondateur de l’après-Vichy ». À la fin des années 1980, et en s’appuyant sur un extrait de l’allocution du 25 août 1944, Henry Rousso a été le premier à souligner son ascendant sur la construction du récit mémoriel dominant : « Fort de sa légitimité, il va inlassablement chercher à écrire et réécrire l’histoire des années de guerre, en proposant une vision issue de son seul imaginaire. » Cette analyse a fait et continue de faire autorité. Chacun, cependant, met l’accent sur tel ou tel point du récit héroïque prêté à la mémoire gaulliste pour mieux en souligner l’affabulation, les failles ou la médication antalgique. Trois concentrent les critiques : la France libérée par elle-même ; le peuple en Résistance ; les embellissements de la légende comme « souvenir écran », comme déni de Vichy, de la collaboration, et de la participation française au génocide des juifs. Depuis les années 1980, les médias, les manuels scolaires et la production historique rappellent ainsi l’existence du mythe et s’emploient à le déconstruire. […]

Une lecture méthodique des prises de parole du général de Gaulle après la Libération ne confirme ni une insistance supposée à affirmer que les Français avaient résisté, ni une insistance à les en persuader. […]

Exception faite du discours de l’Hôtel de Ville à Paris, sur lequel je reviendrai, aucune allusion ne renvoie à la Résistance d’une nation unanime. Si le général de Gaulle parle d’assentiment de la masse, et s’il fait de ce soutien la condition du succès final, il n’entretient pas d’équivoque. Approuver la cause du refus, y compris par une multitude de gestes de solidarité, et participer activement au combat sont deux comportements différents, interdépendants, mais impossibles à confondre.

En revanche, revient en permanence la référence à une élite aux mérites hors du commun. Dès septembre 1944, et de façon régulière ensuite, le général établit une distinction claire entre un petit nombre de femmes et d’hommes d’exception et le reste des Français, entre ceux qui n’ont jamais cédé et les autres. Ses diverses déclarations rappellent tout ce qui est dû à cette sorte de chevalerie, à la minorité de Français qui s’est sacrifiée pour témoigner contre le désespoir et l’inéluctable, pour entraîner et prendre la tête de la cohorte… […]

Les commentateurs qui font du général de Gaulle le père et le missionnaire infatigable du mythe résistancialiste s’appuient — et parfois uniquement — sur le fameux et très court passage du discours de l’Hôtel de Ville de Paris élevé au statut de texte fondateur. […]

La journée du 25 août a été particulièrement chargée pour le général de Gaulle. Il ne s’exprime qu’en fin de journée à l’Hôtel de Ville, dernière étape d’un lourd programme où rien n’a été laissé au hasard — si ce n’est des bifurcations d’itinéraire imposées par des fusillades –, mais où il ne manifeste aucun empressement pour rencontrer les chefs de l’insurrection parisienne. […]

Si le contexte, ensuite, a peut-être incité le chef du GPRF à forcer momentanément le trait pour aller au-devant des attentes de son auditoire, il n’a pas véritablement pesé sur l’ensemble de la déclaration. Improvisée ou non, la part faire à l’émotion reste limitée à l’exorde. La suite de l’intervention, clairement maîtrisée, s’organise très vite autour de grandes lignes où domine la notion de devoir face à la guerre, où sont affirmées avec fermeté l’indépendance nationale — « la France rentre à Paris chez elle » –, l’unité nécessaire, et où la distribution des mérites n’est pas fortuite. […]

On ne trouve pas dans les propos du général les signes d’une politique de la mémoire en continuité de pensée avec la signification habituellement donnée à la phrase du 25 août 1944. Si l’absence d’une confirmation postérieure ne suffit pas à priver cette interprétation de tout crédit, elle interroge sur sa portée, sur le sens qui lui est attribué, et donc sur ce qui revient à Charles de Gaulle dans la construction du mythe résistancialiste. Ce qui ressort est à l’inverse le rôle éminent d’une élite minoritaire, célébré avec insistance. Apologie qui ne conduit pas nécessairement au raccourci grossier opposant l’héroïsme de quelques-uns à la veulerie de la masse. Il n’y a pas de contradiction entre une vision guerrière de la Résistance et la réalité sociale d’un non-consentement exprimant sous des formes multiples une solidarité et un soutien de plus en plus affermis à la cause incarnée par cette élite.

Pierre Laborie, « Les comportements collectifs et la mémoire gaulliste : mots et usages », in Jacqueline Sainclivier, Jean-Marie Guillon et Pierre Laborie (sous la direction de), Images des comportements sous l’Occupation. Mémoires, transmission, idées reçues, Rennes, PUR, 2016, pp. 19-33.

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Un fragment autographe conservé par le musée Carnavalet

Dans un passage non reproduit du texte ci-dessus, Pierre Laborie s’interroge sur la signification de la locution « c’est-à-dire » dans la seule version enregistrée de l’allocution : « Même si la précision “c’est-à-dire” a disparu du discours du 25 août, le besoin de spécifier ce jour-là ce qu’était “la vraie France” — sensible à l’audition, dans l’intonation de la voix — n’était peut-être pas fortuit. Le général avait le secret des formules ouvertes à d’innombrables possibilités d’interprétation. On peut ajourer à la liste celle qui disait à ses yeux l’essentiel sur les comportements : “Jamais la France ne crut que l’ennemi ne fût point l’ennemi.” C’est évidemment la vision quasi religieuse de la France et de son histoire qui inspire en permanence les propos du général, grand lecteur de Péguy. Immense question… Pour Charles de Gaulle, la France et les Français sont deux réalités différentes, impossibles à confondre. Contrairement aux approximations venues de la diversité d’emploi de la notion de résistancialisme, la France est autre chose et plus que les Français, plus et autre chose que la Résistance, elle-même autre chose et plus que les organisations qui l’incarnent. » Le fragment autographe conservé par le musée Carnavalet apporte la même précision.

Le général de Gaulle

25 août 1944

Paris martyr, mais libéré par son peuple, lutte avec toute la France, avec celle qui se bat, je veux dire avec la France éternelle.

C. de Gaulle

Le fragment autographe sur le site du musée Carnavalet

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Le récit de la journée dans un numéro des Documents pour la classe publié en 1964

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