Les monuments à la République de Morice et Dalou

L’Exposition universelle qui s’ouvre à Paris le 1er mai 1878 est propice à la célébration de la République. La crise du 16 Mai ouverte l’année précédente par le président Mac Mahon s’est terminée par la victoire des républicains lors des élections des 14 et 28 octobre 1877. À Paris, les élections municipales des 6 et 13 janvier 1878 marquent une nouvelle défaite pour les conservateurs. Le 30 mars, sur la proposition de Jobbé-Duval, le conseil municipal décide d’ouvrir un concours pour l’érection d’une statue de la République sur une place publique, avant d’en fixer le programme le 11 avril : une statue de cinq mètres représentée debout. Devant les tergiversations du gouvernement, il réaffirme ses intentions dans un ordre du jour du 11 avril : « l’érection sur une place de la capitale d’une statue colossale de la République possédant les attributs de la souveraineté et coiffée du bonnet phrygien, emblème de liberté ». L’année suivante, après la démission de Mac Mahon et l’élection de Jules Grévy (30 janvier 1879), dans sa séance du 18 mars, le conseil municipal fixe la hauteur de la statue à sept mètres, précise qu’elle « sera représentée conformément au type traditionnel » et choisit son emplacement, la place du Château-d’Eau, renommée place de la République le 4 mai. Le concours est ouvert par un arrêté du préfet de la Seine du 2 avril. Au premier degré (14 octobre 1879), le jury retient trois projets, ceux de Gautherin, Morice et Soitoux ; au second degré (3 mai 1880), il se prononce pour le projet de Léopold Morice. Écarté au premier degré, le projet de Jules Dalou est cependant acquis par la municipalité (29 juin 1880) afin d’être installé sur la place du Trône, renommée place de la Nation le 14 juillet. Deux figures allégoriques cohabitent depuis 1848 ; celle de la République modérée, une figure maternelle, assise ou debout, mais immobile et désarmée, le sein couvert, les cheveux attachés ; celle de la République radicale, une figure juvénile, debout, armée et en mouvement, le sein découvert, les cheveux détachés, coiffée du bonnet phrygien. Les deux statues de Morice et Dalou portent le bonnet, mais la première est immobile sur son piédestal et tient un rameau d’olivier dans sa main droite tandis que la seconde est en mouvement, campée sur un char tiré par deux lions, le sein découvert.


L’ordre du jour du 11 mai 1878

CONSEIL MUNICIPAL DE PARIS

Séance du 11 mai [1878]

STATUE DE LA RÉPUBLIQUE

M. Viollet-le-Duc demande à M. le préfet quels sont les résultats de ses négociations avec M. le ministre de l’intérieur, relativement à la délibération prise par le conseil municipal, concernant l’érection d’une statue colossale de la République sur une place de la capitale.

M. le préfet répond que le gouvernement revendique le droit de désigner la place sur la quelle.la statue doit être élevée et les attributs que doit porter cette statue. M. le préfet ne peut donc approuver qu’une délibération tenant compte sur ces deux points des observations du gouvernement.

À la suite d’une observation de M. Jobbé-Duval au sujet de la statue de Soitoux, M. le préfet de la Seine fait observer que le ministre du commerce s’est borné à demander au conseil son concours financier pour l’exécution d’une statue de la République. Le conseil a refusé ce concours, mais M. le ministre n’a pas renoncé à l’exécution de la statue de la République.

M. Ulysse Parent demande quels sont les emblèmes que M. le ministre de l’intérieur désire voir donner à la statue de la République.

M. Viollet-le-Duc dit que si M. le ministre ne croit pas que le conseil ait le droit : 1o de fixer l’emplacement d’une statue de la République ; 2o de déterminer les attributs de cette statue, la discussion pourrait être close par l’adoption de l’ordre du jour suivant, par lequel le conseil dégagerait sa responsabilité :

« Vu la délibération en date du 11 avril par laquelle le conseil a émis l’avis suivi d’un vote approbatif, touchant l’érection sur une place de la capitale d’une statue colossale de la République possédant les attributs de la souveraineté et coiffée du bonnet phrygien, emblème de liberté, et auquel le conseil ne saurait attacher une autre signification, statue qui serait mise au concours entre les artistes français à la suite d’un programme rédigé par ladite commission ;

« Considérant que le conseil, interprète des sentiments de la grande majorité des habitants de Paris, en émettant ce vote a voulu, pendant l’Exposition même, présenter aux étrangers et à la France un symbole visible de la République, forme du gouvernement définitivement établi après tant d’épreuves ;

Considérant que chaque nationalité accuse aux yeux de tous, par un signe ou une personnification sensible, le principe du gouvernement reconnu et respecté ;

« Qu’en proclamant et défendant la république, la France s’attendait à trouver à Paris, au milieu môme de l’Exposition ou sur un point apparent de la ville, cette personnification de la république ;

« Considérant que le conseil, en ouvrant ce concours et en votant les fonds nécessaires à son exécution, a entendu, pour répondre au sentiment généralement exprimé, placer provisoirement un modèle ébauché de cette statue, afin de l’exposer en public sur une place de la ville le jour de la fête attendue par la population ;

« Considérant que le refus d’approbation de la délibération du conseil municipal, dans la forme où elle a été prise par l’autorité supérieure, le met dans l’impossibilité de répondre au vœu manifesté par la population dans les délais indiqués au programme susmentionné

« Le conseil décline toute responsabilité touchant cet objet et passe à l’ordre du jour.

« Signé : Viollet-le-Duc. »

Cet ordre du jour est mis aux voix et adopté à l’unanimité.

Le Temps, 13 mai 1878.


L’acquisition par la ville de l’œuvre de Dalou

Conseil municipal de Paris

Séance du 29 juin 1880

L’ordre du jour appelle la discussion du rapport présenté par M. Ulysse Parent sur l’acquisition du groupe allégorique de M. Jules Dalou, qui a figuré à l’exposition du concours pour l’érection d’une statue monumentale de la République.

M. le rapporteur : Le jury du concours, tout en reconnaissant la haute valeur artistique de l’œuvre de M. Dalou, ne l’a pas couronnée parce qu’elle ne se trouvait pas dans les conditions du programme. Mais il en a proposé l’acquisition par la Ville, d’accord avec l’administration. La commission estimant, elle aussi, que ce groupe, manifestation éclatante d’un art révolutionnaire nouveau, est une des plus belles œuvres exécutées depuis longtemps, vous propose de l’acquérir pour en orner une place publique de Paris.

La dépense totale d’achat, de fonte, de frais accessoires, monte à la somme de 250,000 fr. Elle serait couverte par des économies successives qui seraient faites pendant plusieurs années sur notre budget des beaux-arts.

Reste la question d’emplacement. La place du Trône nous a semblé excellente à tous les titres. Une considération surtout nous a fait pencher en sa faveur. Deux grandes voies seulement donnent accès dans Paris : l’avenue de la Grande-Armée, aboutissant à la place de l’Étoile ; l’avenue de Vincennes, aboutissant à la place du Trône. Sur la place de l’Etoile, un arc-de Triomphe a été dédié à la France militaire et conquérante ; ne convient-il pas d’élever à l’autre extrémité de la capitale un monument impérissable et qui rappellerait une gloire nationale plus pure, si vous le consacrez au génie de la Révolution française et à la république qui en est issue ? La place du Trône prendrait dès lors le nom de place de la Nation. (Adopté.)

Journal des débats politiques et littéraires, 1er juillet 1880.


La première inauguration de La statue de la République

La statue de la République est inaugurée une première fois, place de la République, ancienne place du Château-d’Eau, le 14 juillet 1880, une seconde fois le 14 juillet 1883, après son installation définitive.

LA FÊTE DU 14 JUILLET. — Illumination de la place de la République (ancienne place du Château-d’Eau) avec le projet de monument de M. Morice, statuaire. (Dessin de M. Scott.)

La place de la République. — Dire que Paris s’est couché mardi serait peut-être s’aventurer : car, le 14 juillet, dès six heures du matin, les rues, les places, les boulevards des anciennes banlieues annexées présentaient une activité qui révélait déjà plusieurs heures de travail. On montait des arcs de triomphe, on tendait des cordes en travers des rues pour soutenir des oriflammes ou des guirlandes ; partout où se trouvait un carrefour, une petite place un peu close, on dressait des estrades pour un concert ou un bal.

Nous ne saurions évaluer, même approximativement, le nombre des personnes qui ont visité la place de la République pendant la journée.

Dès neuf heures du matin, une foule considérable entourait la reproduction de l’œuvre de M. Morice.

La gigantesque statue de la République, coiffée d’un bonnet phrygien, est placée sur un piédestal qui rappelle celui du maréchal Moncey, place de Clichy. La République, debout, tient dans la main droite une branche d’olivier doré, et s’appuie de la main gauche sur les tables de la Loi.

Devant le piédestal est édifié un lion couché. La Liberté, l’Égalité et la Fraternité entourent la République. Entre chacune de ces statues est gravée cette inscription :

À LA GLOIRE
DE LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
14 JUILLET 1880

Des bas-reliefs, représentant les principales journées républicaines sont disposés autour du piédestal.

Outre les rampes de gaz et les guirlandes de lanternes vénitiennes rouges, la municipalité avait fait élever, autour de cette statue, quatre pyramides.

A neuf heures, la place de la République présentait un aspect féérique. Tout autour, une triple guirlande de lanternes vénitiennes et de becs de gaz, des trophées enflammés et de nombreuses colonnes que couronnaient des flammes de Bengale, donnaient à cette illumination un caractère particulièrement grandiose.

La statue de la République, devant laquelle se succèdent, comme pendant la journée, les délégations, les orphéons et les fanfares, se dressait sous les reflets de projections électriques.

Le Monde illustré, 24 juillet 1880.

La Fête du 14 Juillet d’Alfred-Philippe Roll (1882)


La première inauguration du Triomphe de la République

Le Triomphe de la République est inauguré une première fois, place de la Nation, ancienne place du Trône, le 21 septembre 1889, une seconde fois le 19 novembre 1899, après son installation définitive.

PARIS. — INAUGURATION, SUR LA PLACE DE LA NATION, DU MONUMENT : LE TRIOMPHE DE LA RÉPUBLIQUE. — M. DALOU, statuaire. — (D’après nature, par M. GÉRARDIN.)

C’EST dans la journée du 21 septembre qu’a eu lieu, à deux heures l’inauguration du monument du Triomphe de la République, exécuté par le sculpteur Dalou, et élevé sur la place de la Nation, ancienne place du Trône.

La place de la Nation et l’entrée du faubourg Saint-Antoine étaient brillamment pavoisées. De grands mâts portaient des écussons et des faisceaux de drapeaux tricolores.

Deux tribunes élégantes avaient été dressées à droite et à gauche du monument. C’est dans celle de droite que le président de la République et les personnages officiels ont pris place.

La foule qui se pressait à l’entrée du faubourg Saint-Antoine et sur la place de la Nation était innombrable.

[…]

Le projet de l’œuvre de M. Dalou avait figuré au concours organisé par le Conseil municipal en 1879, en vue de glorifier par une statue monumentale les institutions démocratiques de la France. Les proportions de l’œuvre conçue par l’éminent artiste, firent hésiter le comité, et son projet, très discuté, fut néanmoins mis hors concours, en raison de sa valeur. Ce fut le projet de M. Morice qui obtint les suffrages du jury, et qui décore aujourd’hui la place du Château-d’Eau.

Le Conseil municipal décida toutefois que l’on exécuterait les deux monuments au lieu d’un seul ; c’est ainsi que le magnifique travail de M. Dalou ne fut pas perdu, et que ses admirateurs peuvent aujourd’hui contempler sur la place de la Nation, sa très exacte représentation exécutée en plâtre bronzé.

Le Monde illustré, 28 septembre 1889.

Le dessin de Gérardin, collection Jaquet.


L’œuvre de Dalou selon Maurice Demaison

En exil en Angleterre depuis la défaite de la Commune, Jules Dalou participe au concours ouvert par la municipalité parisienne pour la statue de la place de la République en 1879 et rentre en France en 1880. Son projet est écarté au premier degré du concours, parce qu’il ne correspond pas au programme, mais la municipalité décide néanmoins de l’acquérir afin de l’installer sur la place de la Nation. Après la seconde inauguration du Triomphe de la République (19 novembre 1899), dans un article de la Revue de l’art ancien et moderne du 10 janvier 1900, le critique Maurice Demaison rappelle l’origine des deux monuments et donne une description du second.

Jules Dalou, Le Triomphe de la République, La Revue de l'art ancien et moderne, 1900 (profil)

Ce fut à cette époque qu’en lisant un journal il apprit que la municipalité parisienne, dans sa séance du 18 mars 1879, avait décidé d’ériger sur l’ancienne place du Château-d’Eau une statue de la République et instituait, à cet effet, un concours entre tous les sculpteurs français. Pour un artiste comme lui, que ses études, non moins que ses instincts, poussaient naturellement vers la sculpture monumentale, il y avait là une chance inespérée de réaliser un ensemble hautement décoratif, en même temps qu’une occasion unique d’exprimer, dans une œuvre d’art exceptionnellement importante, l’ardeur de sa foi républicaine, généreuse jusqu’à l’illusion.

Dès la première épreuve, et bien que tout le monde rendît hommage, non seulement au talent de l’artiste, mais au mérite de sa maquette, le projet de M. Dalou fut résolument écarté par une raison de principe : on avait demandé aux concurrents une statue, un piédestal et des figures autour du piédestal ; M. Dalou avait eu la hardiesse de fondre ces éléments et de grouper les personnages dans une action commune ; on jugea qu’il était sorti des bornes du programme. Il était surtout sorti, ce qui est beaucoup plus grave, de la banalité.

Heureusement, sur la proposition du peintre Jobbé-Duval et de M. Hérold, préfet de la Seine, le jury, tout en repoussant, comme étranger au programme, le projet de M. Dalou, émit le vœu qu’il fût exécuté aux frais de la ville dans quelque autre emplacement. Ce vœu fut ratifié par un vote du Conseil municipal en date de mai 1880, et, l’année suivante, l’artiste, rentré en France, put se mettre à l’ouvrage. Le labeur était colossal. Il s’agissait d’établir le modèle d’un groupe dont chacune des figures n’avait pas moins de cinq mètres de haut. C’est alors qu’il eut à se ressouvenir des exemples de Carpeaux, de Rude et des leçons de Versailles, alors aussi qu’il dut se refaire à lui-même toute une technique nouvelle. Après neuf ans de travail, le modèle était achevé, et, en 1889, pour se rendre compte de l’effet, M. Dalou en installa provisoirement le plâtre au milieu du bassin de la place de la Nation.

Jules Dalou, Le Triomphe de la République, La Revue de l'art ancien et moderne, 1900 (face)

Coulé en bronze, le monument définitif est semblable, dans ses grandes lignes, au projet que M. Dalou avait envoyé au concours de 1879. C’est toujours la République debout sur un char de triomphe, guidé par la Liberté, escorté par le Travail et la Justice, suivi de la Paix. Mais beaucoup de détails ont été modifiés. La statue principale, celle de la République, notamment, a été transformée. Elle était, dans la maquette, enveloppée d’une écharpe flottante qui avait le défaut de rappeler les draperies en coup de vent de l’école italienne, et, par contre, l’avantage d’animer la silhouette, de la faire participer au mouvement de tout ce groupe qui s’élance en avant avec une si fougueuse ardeur. Elle porte aujourd’hui une courte robe de laine, très simple, presque grossière : appuyée d’une main sur le faisceau des lois, elle tend l’autre bras, d’un geste calme, pacifique ; sa démarche, assurée et légère, est celle d’une déesse rustique ; le visage est serein ; le regard, charmant de confiance, d’ingénuité, de jeunesse. Parmi tant d’effigies républicaines que nous ont données, depuis trente ans, les sculpteurs, les peintres et les médaillistes, voici la seule qui nous satisfasse pleinement : c’est à la fois une admirable statue et un symbole parfaitement expressif avec un minimum de convention. Le seul reproche qu’on pourrait lui faire, c’est d’être, en raison même de sa simplicité, d’un style assez différent de l’ensemble. Elle s’accorde à merveille avec le groupe du Travail où l’on voit un robuste forgeron, ceint du tablier de cuir, le marteau sur l’épaule et poussant, de son bras vigoureux, l’une des roues du char. Mais le char lui-même, pompeux comme une machine d’opéra au temps de Louis XIV : les lions qui le traînent, tout chamarrés de festons et de guirlandes ; la Justice, d’une somptuosité vénitienne; les spirituelles attitudes des enfants, des génies qui se jouent, entre les figures principales, parmi les accessoires allégoriques ; en un mot, la plus grande partie du monument a une animation, une vivacité, un « panache », comme aurait dit Sarcey, qui peut-être s’accommodaient d’un couronnement, tel que M. Dalou l’avait conçu d’abord, plus pittoresque et plus « ronflant ».

Aussi bien, n’est-ce là qu’une critique de détail, ou pour mieux dire une impression. Et l’on ne saurait trop louer l’abondance, la verve, le lyrisme de l’œuvre, en même temps que l’extraordinaire habileté et la science du sculpteur. Si la figure de la Paix, au revers du monument, s’isole un peu trop de l’ensemble, les masses des autres groupes s’équilibrent et leurs silhouettes s’harmonisent suivant un rythme que rendaient difficile le nombre des personnages et leur diversité. Il y a, dans chacun de ces groupes, d’étonnantes trouvailles. Nous avons déjà dit la mâle vigueur du forgeron qui représente le Travail, la grâce majestueuse de la Justice ; il faudrait noter aussi l’allure inspirée du génie de la Liberté, le beau mouvement du lion qui caresse sa lourde tête au timon du char triomphal, l’amusante variété des enfants qui portent ici les fruits de l’abondance, là les balances de Thémis, ailleurs les livres, les outils, et dont chacun est un chef-d’œuvre ; il faudrait surtout indiquer l’ingénieux arrangement de la face antérieure où les lignes, symétriquement inclinées, des deux figures d’appui, encadrent de façon si heureuse le groupe du premier plan et soutiennent si naturellement la statue principale. Mais la gravure, à cet égard, vaut mieux que toutes les descriptions. Et ce qui est préférable encore, c’est d’aller étudier sur la place du Trône le monument lui-même ; cette apothéose de la République qui se déploie, entre les colonnes de Philippe-Auguste et de saint Louis, dans le lieu où Perrault, voilà deux siècles passés, bâtissait, à l’occasion du mariage du roi, un arc de triomphe colossal.

Maurice Demaison, « Artistes contemporains. M. Dalou », La Revue de l’art ancien et moderne, 10 janvier 1900, pp. 29-44.

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